CONTADOR ET BAUME COCO
17.7.10
Le peloton est en transit.
Allongée sous le soleil, la France le digère tranquillement. Il avance, immobile, sous l’effet des contractions de la route, déjà bien entamé par les sucs et les acides, brassé, malaxé. Il accomplit inexorablement la métamorphose au terme de laquelle il apparaîtra sur le bitume des Champs-Elysées, bronzé, superbe, et rempli de phosphore.
Son passage, naturellement, s’accompagne d’odeurs. Ce ne sont pas celles qu’on s’imagine. Le vent, s’il souffle dans son dos, envoie aux spectateurs situés en aval un avant-goût de baume, celui –chauffant, bien sûr- du Tigre, à la bergamote. Autant les Anglo-Saxons fleurent bon le cajeput et l’huile de raisin, autant les Italiens –plus coquets, on le sait- se repèrent au thé vert mariné de panthénol qui entrent dans la composition de gel pour cheveux qu’ils affectionnent. Monoï des écrans protecteurs, fragrances urbaines des sent-bons Versace, Azzaro, et même, pour Ballan, Paco Rabanne.
D’autres sels encore arrivent au nez du regardeur bien positionné (en haut d’un escabeau par exemple). C’est ici le jambon et le fromage, remontant de la musette des coureurs locaux, dont on peut ainsi facilement deviner le terroir, là la biscotte, le paprika. Viennent ensuite les arômes âpres du carbone, de la gomme des pneus qui s’échauffe, du plastique neuf des casques, puis ceux, goût moutarde ou coco, de la crème qui nappe le fond des cuissards.
Hier, à l’approche des coureurs, dans la montée Jalabert, votre serviteur et expert en avait plein les narines. La plus grosse constatait la forte odeur d’hôpital, propre au coureur au bord de l’abandon, tandis que l’autre, plus subtile, attrapait la petite brise couleur casino de celui qui s’apprête à placer une attaque. Dos à la route, laissant seulement dépasser de la foule mon puissant tarin, je m’amusais à distinguer le parfum distingué de l’ambitieux qui approche du bouquet de sueur froide de l’intranquille.
Ainsi, n’avons-nous eu besoin que de renifler un grand coup pour annoncer à haute voix –et avec une poignée de secondes d’avance- le démarrage du Condor de Pinto.
Le voici, donc –je le sens- qui contre-attaque le grimpeur Rodriguez.
A la tête d’un groupe de leaders déjà bien ridés, le grand Lux, pas super placé, laisse son rival prendre dix mètres, entame la poursuite, puis sage, s’asseoit et fait la montée en sérieux.
Le Ber, sautillant comme une puce, affolé, emmène Rodriguez au sommet, afin d’y croquer ce bon Vino –parti le matin.
Ils basculent à deux vers l’aérodrome.
Rodriguez –qui n’a trop rien à faire du général- ne prend aucun relais. Cohérent, Contador fonce à grandes manivelles vers la ligne, empêchant Vinokourov de revenir. Rodriguez n’a plus alors qu’à l’ajuster, d’un élégant saute-mouton.
Dans la voiture, Alberto avait le verbe triomphant mais l’expression morose. Le gagnant de la journée ? Vraiment ?
Vino –devant pendant toute l’étape- ne sera pas reparti Wino de Mende, et c’est Andy Schleck, pourtant débitaire de dix secondes, qui arborait le plus grand sourire.
Toujours de jaune vêtu, il avait l’air d’une jouvencelle qui vient d’assister à la déclaration brouillonne de son soupirant, joue l’indifférente, mais s’en trouve flattée.
Alberto, pauvre de toi, qu’as-tu fait ?
Ton attaque a trahi tes sentiments.
Pascal d’Huez, depuis Mende.
Allongée sous le soleil, la France le digère tranquillement. Il avance, immobile, sous l’effet des contractions de la route, déjà bien entamé par les sucs et les acides, brassé, malaxé. Il accomplit inexorablement la métamorphose au terme de laquelle il apparaîtra sur le bitume des Champs-Elysées, bronzé, superbe, et rempli de phosphore.
Son passage, naturellement, s’accompagne d’odeurs. Ce ne sont pas celles qu’on s’imagine. Le vent, s’il souffle dans son dos, envoie aux spectateurs situés en aval un avant-goût de baume, celui –chauffant, bien sûr- du Tigre, à la bergamote. Autant les Anglo-Saxons fleurent bon le cajeput et l’huile de raisin, autant les Italiens –plus coquets, on le sait- se repèrent au thé vert mariné de panthénol qui entrent dans la composition de gel pour cheveux qu’ils affectionnent. Monoï des écrans protecteurs, fragrances urbaines des sent-bons Versace, Azzaro, et même, pour Ballan, Paco Rabanne.
D’autres sels encore arrivent au nez du regardeur bien positionné (en haut d’un escabeau par exemple). C’est ici le jambon et le fromage, remontant de la musette des coureurs locaux, dont on peut ainsi facilement deviner le terroir, là la biscotte, le paprika. Viennent ensuite les arômes âpres du carbone, de la gomme des pneus qui s’échauffe, du plastique neuf des casques, puis ceux, goût moutarde ou coco, de la crème qui nappe le fond des cuissards.
Hier, à l’approche des coureurs, dans la montée Jalabert, votre serviteur et expert en avait plein les narines. La plus grosse constatait la forte odeur d’hôpital, propre au coureur au bord de l’abandon, tandis que l’autre, plus subtile, attrapait la petite brise couleur casino de celui qui s’apprête à placer une attaque. Dos à la route, laissant seulement dépasser de la foule mon puissant tarin, je m’amusais à distinguer le parfum distingué de l’ambitieux qui approche du bouquet de sueur froide de l’intranquille.
Ainsi, n’avons-nous eu besoin que de renifler un grand coup pour annoncer à haute voix –et avec une poignée de secondes d’avance- le démarrage du Condor de Pinto.
Le voici, donc –je le sens- qui contre-attaque le grimpeur Rodriguez.
A la tête d’un groupe de leaders déjà bien ridés, le grand Lux, pas super placé, laisse son rival prendre dix mètres, entame la poursuite, puis sage, s’asseoit et fait la montée en sérieux.
Le Ber, sautillant comme une puce, affolé, emmène Rodriguez au sommet, afin d’y croquer ce bon Vino –parti le matin.
Ils basculent à deux vers l’aérodrome.
Rodriguez –qui n’a trop rien à faire du général- ne prend aucun relais. Cohérent, Contador fonce à grandes manivelles vers la ligne, empêchant Vinokourov de revenir. Rodriguez n’a plus alors qu’à l’ajuster, d’un élégant saute-mouton.
Dans la voiture, Alberto avait le verbe triomphant mais l’expression morose. Le gagnant de la journée ? Vraiment ?
Vino –devant pendant toute l’étape- ne sera pas reparti Wino de Mende, et c’est Andy Schleck, pourtant débitaire de dix secondes, qui arborait le plus grand sourire.
Toujours de jaune vêtu, il avait l’air d’une jouvencelle qui vient d’assister à la déclaration brouillonne de son soupirant, joue l’indifférente, mais s’en trouve flattée.
Alberto, pauvre de toi, qu’as-tu fait ?
Ton attaque a trahi tes sentiments.
Pascal d’Huez, depuis Mende.
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