PARESSEUX
9.7.10
Il serait paresseux de dire qu’il ne s’est rien passé cet après-midi entre Reims et Montargis. Au contraire, pour qui prend le temps d’observer, il s’est produit des évènements d’entomologiste, des raffinements imperceptibles, qui, déchiffrés, permettent dès maintenant de deviner le destin de la course, avant qu’elle n’aborde, samedi, son premier tournant.
Mark Cavendish est enfin parvenu à sortir en tête du déboulé des furieux, aujourd’hui lâchés dans les rues de Montargis. C’est la nouvelle de la journée, après les deux échecs du Bolide de Man face à lui-même. Cette fois, les Columbia, futés, ont laissé les Garmin se dépouiller pour Farrar, avant de profiter de leur maladresse pour envoyer tranquillement Cavendish à l’essai. Renshaw, l’éxécuteur des basses œuvres de l'autre Mark, a su jouer des coudes pour écarter Freire puis Hushovd, esseulés. C’est parce qu’elle a remporté la sombre bataille des diplomates que la Columbia a fini par s'adjuger l’étape.
Tièdement lancé à la poursuite d’une échappée partie dès les premiers kilomètres (Gutierez, Van de Walle et le Cofidisque El Farès), le peloton n’a pas eu à trop galérer pour remettre la main sur ses trublions, repris à six kilomètres du but. Comme hier, le final n’offrait aucun abri (sept virages en tout et pour tout dans les quinze derniers kilomètres), pas la moindre bosse, ni la plus petite flaque d’huile pour rétablir l’équilibre entre chasseurs et chassés, quand bien même les coureurs, lassés sans doute, ont arrêté de tomber. Côté sport, on notera la jolie résistance de Guti et -surtout- la réalisation grandiose de Jean-Maurice Ooghe, qui donne actuellement son meilleur, au moment où, le peloton suffisamment étiré, l’hélico peut à loisir glisser sur son aile gauche afin de faire péter des travellings de plusieurs kilomètres.
Parmi les favoris, c’est l’heure de la planque (dans le ventre mou, entre deux coéquipiers, ou sous cape) et l’on ne sort guère le bout de son nez que pour aller chercher sa musette. On laisse les croûtes sécher au soleil et lorsqu'un bon copain, parti dans une équipe rivale, s’approche, on ne rate pas l’occasion de taper la discute. Pour ceux qui n’ont ni sprinteur, ni coureur échappé, on s’oblige à de petits exercices. Une participation de loin à un sprint-bonif ou n’importe quelle fantaisie à mettre sous la dent du sponsor. C’est ainsi qu’on se retrouve avec une perruque sur la tête dans le résumé du jour. Il ne faudrait pas que ça s’éternise non plus, le farniente. Le scénariste de Plus Belle la Vie pourrait être demandé à la rescousse par Christian Prudhomme, au cas où, pas si improbable, des coureurs chuteraient pour s’être –simplement- endormis. Que le patron se rassure, les Alpes interlopes et des Saxo remontés ramèneront bientôt action et violence. On ne s’explique pas cette incompréhensible nostalgie qu’on apercevait ce soir dans le regard de certains coureurs ? Pourtant simple. Chez eux, contrairement au calendrier en cours dans la société civile, c’est vendredi soir la fin du week-end.
On m'a raconté que l’Albert, qui n’a guère commenté sa traversée du Nord, a offert ce matin une montre à Lance Armstrong, pour le remercier de sa participation au triomphe Astana de l’an passé. Ce serait, paraît-il, une tradition inaugurée par Greg Lemond au début des années 90, qui veut qu’on récompense d’une babiole ses anciens coéquipiers lors du Tour qui suit sa victoire.
Réaction de l’intéressé : « Des montres, j’en ai déjà beaucoup, Alberto veut peut-être me dire que je dois me mettre à l’heure (rires partagés avec Bruyneel, gâté lui aussi) ou qu’il va régler mon tempo...
Il devrait faire preuve de modestie et savoir que personne ne peut se vanter d’être le maître du temps, car le temps est un mécanisme profond, qui fait intervenir le Soleil, et aussi la Lune, je crois ». Ce témoignage, bien que totalement faux, en dit long sur l’incompréhension qui règne entre les deux rivaux.
Lance conservera-t-il sa montre ?
Et si oui, l'accrochera-t-il, comme on le murmure, au dossard de Popovytch afin de se rappeler que la vie n'est qu'un songe ?
Pascal d’Huez, depuis Montargis.
Mark Cavendish est enfin parvenu à sortir en tête du déboulé des furieux, aujourd’hui lâchés dans les rues de Montargis. C’est la nouvelle de la journée, après les deux échecs du Bolide de Man face à lui-même. Cette fois, les Columbia, futés, ont laissé les Garmin se dépouiller pour Farrar, avant de profiter de leur maladresse pour envoyer tranquillement Cavendish à l’essai. Renshaw, l’éxécuteur des basses œuvres de l'autre Mark, a su jouer des coudes pour écarter Freire puis Hushovd, esseulés. C’est parce qu’elle a remporté la sombre bataille des diplomates que la Columbia a fini par s'adjuger l’étape.
Tièdement lancé à la poursuite d’une échappée partie dès les premiers kilomètres (Gutierez, Van de Walle et le Cofidisque El Farès), le peloton n’a pas eu à trop galérer pour remettre la main sur ses trublions, repris à six kilomètres du but. Comme hier, le final n’offrait aucun abri (sept virages en tout et pour tout dans les quinze derniers kilomètres), pas la moindre bosse, ni la plus petite flaque d’huile pour rétablir l’équilibre entre chasseurs et chassés, quand bien même les coureurs, lassés sans doute, ont arrêté de tomber. Côté sport, on notera la jolie résistance de Guti et -surtout- la réalisation grandiose de Jean-Maurice Ooghe, qui donne actuellement son meilleur, au moment où, le peloton suffisamment étiré, l’hélico peut à loisir glisser sur son aile gauche afin de faire péter des travellings de plusieurs kilomètres.
Parmi les favoris, c’est l’heure de la planque (dans le ventre mou, entre deux coéquipiers, ou sous cape) et l’on ne sort guère le bout de son nez que pour aller chercher sa musette. On laisse les croûtes sécher au soleil et lorsqu'un bon copain, parti dans une équipe rivale, s’approche, on ne rate pas l’occasion de taper la discute. Pour ceux qui n’ont ni sprinteur, ni coureur échappé, on s’oblige à de petits exercices. Une participation de loin à un sprint-bonif ou n’importe quelle fantaisie à mettre sous la dent du sponsor. C’est ainsi qu’on se retrouve avec une perruque sur la tête dans le résumé du jour. Il ne faudrait pas que ça s’éternise non plus, le farniente. Le scénariste de Plus Belle la Vie pourrait être demandé à la rescousse par Christian Prudhomme, au cas où, pas si improbable, des coureurs chuteraient pour s’être –simplement- endormis. Que le patron se rassure, les Alpes interlopes et des Saxo remontés ramèneront bientôt action et violence. On ne s’explique pas cette incompréhensible nostalgie qu’on apercevait ce soir dans le regard de certains coureurs ? Pourtant simple. Chez eux, contrairement au calendrier en cours dans la société civile, c’est vendredi soir la fin du week-end.
On m'a raconté que l’Albert, qui n’a guère commenté sa traversée du Nord, a offert ce matin une montre à Lance Armstrong, pour le remercier de sa participation au triomphe Astana de l’an passé. Ce serait, paraît-il, une tradition inaugurée par Greg Lemond au début des années 90, qui veut qu’on récompense d’une babiole ses anciens coéquipiers lors du Tour qui suit sa victoire.
Réaction de l’intéressé : « Des montres, j’en ai déjà beaucoup, Alberto veut peut-être me dire que je dois me mettre à l’heure (rires partagés avec Bruyneel, gâté lui aussi) ou qu’il va régler mon tempo...
Il devrait faire preuve de modestie et savoir que personne ne peut se vanter d’être le maître du temps, car le temps est un mécanisme profond, qui fait intervenir le Soleil, et aussi la Lune, je crois ». Ce témoignage, bien que totalement faux, en dit long sur l’incompréhension qui règne entre les deux rivaux.
Lance conservera-t-il sa montre ?
Et si oui, l'accrochera-t-il, comme on le murmure, au dossard de Popovytch afin de se rappeler que la vie n'est qu'un songe ?
Pascal d’Huez, depuis Montargis.
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