VISITE AU MÉMORIAL
6.1.07
Effectuée aujourd’hui la visite du Mémorial de Caen, après m’être glissé dans les rangs d’une classe de CM1.
Je m’y suis souvenu de la victoire d’Oscar Freire sur Tom Boonen, au terme d’une cinquième étape qui, comme moi ce matin, avait vu passer les Andelys, Bourgtheroulde et Pont-l’Evêque, avec le sentiment que des forces obscures avaient tracé son itinéraire par avance.
Depuis le fond du bus scolaire où j’avais trouvé place, j’observais en chantant les longs prés d’herbe verte qui colorent ce coin du pays. Des vaches y stagnaient, attentives ; de celles chez qui le survol par un hélicoptère de France 2 déchaîne des rushes réflexes, qu’on recycle en plans de coupes pour le résumé du jour.
De même qu’il devait encore y avoir au fond des bas-côtés remplis d’eau quelques porte-voix RMC jetés par la caravane, il se trouvait certainement parmi ces bêtes, un spécimen plus sensible que les autres, dont les rêves continuaient d’être agités par la vision multicolore du peloton au bout de son champ, et qui, de ce jour, s’était découvert une vocation de sprinteur, comme l’adolescent renfermé décide de devenir peintre en voyant pour la première fois un Pollock.
Epluché la nuit dernière de A à Z, le Skyblog de Kevin Lebon proposait un grand nombre de photos de lui par lui-même, souvent accompagné d’un vélo, plus rarement de commentaires.
Comme la plupart d’entre nous, il avait meilleure mine sur son site qu’à la morgue. Mèches décolorées fixées au gel, traits sympas et sourire austral, il avait alors toutes ses chances avec les filles. D’ailleurs, elles étaient plusieurs à lui en avoir fait la remarque, dans un langage truffée d’émoticons.
Quelquefois, un pote ou deux avaient rejoint Kevin pour une photo de groupe hilare, en déséquilibre sur une table, torses nus dans une pose hip-hop ou transpirant sous des maillots surchargés de sponsors inconnus, à l’occasion d’une virée, ou de la galette du club.
Fréquents aussi étaient les posts consacrés à ses idoles. Sur ce point, le jeune homme, démontrant une farouche indépendance, penchait clairement pour l’opposition. En 2003, il avait soutenu Mayo, puis Hamilton. Hamilton encore en 2004, jusqu’à son licenciement de la Phonak pour dopage. Depuis, ne faisant jamais allusion à Armstrong, c’était sur Landis que s’étaient reportés ses encouragements. « On y croit ! », affichait une photo du champion américain, mise en ligne par Kevin en juin.
Eprouvant le besoin d’une pause dans mes investigations, je réalise combien cette visite du Mémorial m’a remué. A la vue des impressionnants films du débarquement, je me suis rappelé mes premiers rendez-vous avec Patouche, le long de la forteresse Vauban, sous prétexte de révisions.
A cette époque, sa présence m’inspirait tellement que j’aurais été capable de lui parler cyclisme des jours durant sans jamais m’ennuyer. Mais n’eut-ce pas été abuser ?
Dès hier, à Huy, lorsque je l’avais ouvert, le blog de Kevin m’avait délivré une information qui m’apparaissait de nature à changer le cours de l’énquête.
Pris au fil du parcours, plusieurs dizaines de clichés révélaient avec certitude qu’il avait pris part à la caravane du dernier Tour, en tant que conducteur d’un véhicule publicitaire, pour le compte d’un grand nom du saucisson.
« Et alors ?... Qu’est-ce ça fout ? », me tança Ringenbach, joint par téléphone dans l’enthousiasme de ma découverte, « un bon conseil : rentrez chez vous, et foutez-vous au pieu ! L’affaire est close ».
Sous la loupiote, je passai les liens en revue.
Parmi les sites spécialisés habituels, Cycles Lapierre et Selles Italia, on trouvait les Skyblogs d’amis passionnés, un site de paris sportifs, celui de la taverne des frères Schmitt, et enfin, le « Tatooz », où Ludo Peeters, en homme de parole, venait de mettre ma nuque en ligne.
Enfin, sous la rubrique Archives, se trouvait un bouton Coin Perso, que je me dépêchai de cliquer.
Or, on ne pouvait y accéder que par le biais d’un code secret à six caractères, qui m’était encore inconnu.
Tant pis. Je prenai le parti de poursuivre la route prise par Kevin six mois plus tôt avec la conviction que quelqu'un quelque part avait vu passer la vérité.
Au menu de la journée de demain : cap vers l'ouest pour le franchissement d’un mystère de première catégorie.
Pascal D’Huez, envoyé spécial depuis Caen.
*Je me vois dans l’obligation d’apporter un ajout de dernière minute à ce post envoyé il y a deux heures, car entre temps, aux alentours de minuit, tandis que je venais de trouver le sommeil, un fracas de verre brisé, juste au-dessus de ma tête, m’a brutalement sorti du lit.
Quelqu’un venait de pulvériser la vitre de ma chambre, et si par miracle, je ne suis pas blessé, les débris jonchent encore mon duvet.
Le vigile du Formule 1, monté pour examiner les dégâts, a retrouvé l’objet du délit, qui avait glissé sous la penderie. Il a tenu à me rassurer. Un simple marteau.
Pascal D’Huez, envoyé spécial depuis Caen.
Je m’y suis souvenu de la victoire d’Oscar Freire sur Tom Boonen, au terme d’une cinquième étape qui, comme moi ce matin, avait vu passer les Andelys, Bourgtheroulde et Pont-l’Evêque, avec le sentiment que des forces obscures avaient tracé son itinéraire par avance.
Depuis le fond du bus scolaire où j’avais trouvé place, j’observais en chantant les longs prés d’herbe verte qui colorent ce coin du pays. Des vaches y stagnaient, attentives ; de celles chez qui le survol par un hélicoptère de France 2 déchaîne des rushes réflexes, qu’on recycle en plans de coupes pour le résumé du jour.
De même qu’il devait encore y avoir au fond des bas-côtés remplis d’eau quelques porte-voix RMC jetés par la caravane, il se trouvait certainement parmi ces bêtes, un spécimen plus sensible que les autres, dont les rêves continuaient d’être agités par la vision multicolore du peloton au bout de son champ, et qui, de ce jour, s’était découvert une vocation de sprinteur, comme l’adolescent renfermé décide de devenir peintre en voyant pour la première fois un Pollock.
Epluché la nuit dernière de A à Z, le Skyblog de Kevin Lebon proposait un grand nombre de photos de lui par lui-même, souvent accompagné d’un vélo, plus rarement de commentaires.
Comme la plupart d’entre nous, il avait meilleure mine sur son site qu’à la morgue. Mèches décolorées fixées au gel, traits sympas et sourire austral, il avait alors toutes ses chances avec les filles. D’ailleurs, elles étaient plusieurs à lui en avoir fait la remarque, dans un langage truffée d’émoticons.
Quelquefois, un pote ou deux avaient rejoint Kevin pour une photo de groupe hilare, en déséquilibre sur une table, torses nus dans une pose hip-hop ou transpirant sous des maillots surchargés de sponsors inconnus, à l’occasion d’une virée, ou de la galette du club.
Fréquents aussi étaient les posts consacrés à ses idoles. Sur ce point, le jeune homme, démontrant une farouche indépendance, penchait clairement pour l’opposition. En 2003, il avait soutenu Mayo, puis Hamilton. Hamilton encore en 2004, jusqu’à son licenciement de la Phonak pour dopage. Depuis, ne faisant jamais allusion à Armstrong, c’était sur Landis que s’étaient reportés ses encouragements. « On y croit ! », affichait une photo du champion américain, mise en ligne par Kevin en juin.
Eprouvant le besoin d’une pause dans mes investigations, je réalise combien cette visite du Mémorial m’a remué. A la vue des impressionnants films du débarquement, je me suis rappelé mes premiers rendez-vous avec Patouche, le long de la forteresse Vauban, sous prétexte de révisions.
A cette époque, sa présence m’inspirait tellement que j’aurais été capable de lui parler cyclisme des jours durant sans jamais m’ennuyer. Mais n’eut-ce pas été abuser ?
Dès hier, à Huy, lorsque je l’avais ouvert, le blog de Kevin m’avait délivré une information qui m’apparaissait de nature à changer le cours de l’énquête.
Pris au fil du parcours, plusieurs dizaines de clichés révélaient avec certitude qu’il avait pris part à la caravane du dernier Tour, en tant que conducteur d’un véhicule publicitaire, pour le compte d’un grand nom du saucisson.
« Et alors ?... Qu’est-ce ça fout ? », me tança Ringenbach, joint par téléphone dans l’enthousiasme de ma découverte, « un bon conseil : rentrez chez vous, et foutez-vous au pieu ! L’affaire est close ».
Sous la loupiote, je passai les liens en revue.
Parmi les sites spécialisés habituels, Cycles Lapierre et Selles Italia, on trouvait les Skyblogs d’amis passionnés, un site de paris sportifs, celui de la taverne des frères Schmitt, et enfin, le « Tatooz », où Ludo Peeters, en homme de parole, venait de mettre ma nuque en ligne.
Enfin, sous la rubrique Archives, se trouvait un bouton Coin Perso, que je me dépêchai de cliquer.
Or, on ne pouvait y accéder que par le biais d’un code secret à six caractères, qui m’était encore inconnu.
Tant pis. Je prenai le parti de poursuivre la route prise par Kevin six mois plus tôt avec la conviction que quelqu'un quelque part avait vu passer la vérité.
Au menu de la journée de demain : cap vers l'ouest pour le franchissement d’un mystère de première catégorie.
Pascal D’Huez, envoyé spécial depuis Caen.
*Je me vois dans l’obligation d’apporter un ajout de dernière minute à ce post envoyé il y a deux heures, car entre temps, aux alentours de minuit, tandis que je venais de trouver le sommeil, un fracas de verre brisé, juste au-dessus de ma tête, m’a brutalement sorti du lit.
Quelqu’un venait de pulvériser la vitre de ma chambre, et si par miracle, je ne suis pas blessé, les débris jonchent encore mon duvet.
Le vigile du Formule 1, monté pour examiner les dégâts, a retrouvé l’objet du délit, qui avait glissé sous la penderie. Il a tenu à me rassurer. Un simple marteau.
Pascal D’Huez, envoyé spécial depuis Caen.
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