UNPREDICTABLE
3.7.11
La Vendée. Ses humbles toits de tuiles saumons. Ses Lidl. Ses spectateurs avides de sachets de lessive gratuits lancés par des bibendums.
Au kilomètre 44, à Brem-sur-mer, paisible localité balnéaire où je mettais ce midi les pieds pour la première fois depuis le funeste été 1988, le spectacle n’attend pas le passage des coureurs.
Auprès de moi, un jeune couple est sorti de son pavillon, emportant la table basse. Il arbore une casquette avec des flammes, elle un tatouage cheap dans le bas du dos, et des talons hauts. Sur le trottoir, ils ont l’air heureux, boivent des bières light, s’embrassent, mettent en boîte les gens alentour, pointent du doigt les hélicos.
A force d’attendre les coureurs, il finit par éprouver le besoin de traverser l’îlot, pour aller partager un gobelet de whisky tiède avec une bande de cons.
Elle prend la mouche et lui lance un ultimatum. S’il boit, dit-elle, il aura droit à « la gueule ».
Il choisit de boire.
Elle est déjà au téléphone, renfrognée sur son pliant, quand il revient, dix minutes plus tard, le peloton passé et son gobelet fini. En route pour de longues heures de rame.
Au regard de ce mélodrame, la première étape de ce Tour de France 2011 propose un scénario plan-plan.
Rôdé comme le protocole d’un mariage princier, le début du Tour déroule. Une mini-chute, une sous-crevaison, trois échappés pas exigeants, un chien, une tache sur la nappe, on démarre le périple en s’étirant comme des patachons.
Quand le Tour commence par un prologue (l’usage), c’est différent. La mise sous tension est immédiate. Ce samedi, on a plutôt assisté à un aimable critérium. Pour ne rien arranger, Laurent Fignon n’est même plus là pour réchauffer l’ambiance par ses vacheries de cardinal. S’il n’y avait pas l’été, la chaleur, les ombres bleues, on grelotterait d’emmerdement, comme un soir de Téléthon.
Prévisible, à l’heure du dénouement, Cancellara arrive de derrière et surprend.
Mais le Mont des Alouettes l’écoeure rapidement de tout effort. Philippe Gilbert s’installe dans son sillage, le passe, embrasse deux fois son maillot. Et gagne. Comme prévu (le bougre a même poussé le bouchon jusqu’à se tondre les cheveux couleur paille en prévision du maillot jaune !).
Un quart d’heure plus tôt, une mouche agace une spectatrice. Elle fait un écart, et bouscule l’épaule d’un coureur Astana, qui s’effondre.
Si l’on voulait filer la métaphore (ce qui n’est vraiment pas le genre de la maison), et assimiler le peloton à une imprimante écrivant l’histoire du sport sur la route-page, on oserait écrire que le chaos qui suivit cette chute, est l’exact équivalent du fameux « bourrage-papier ».
Alberto Contador, inexplicablement mal placé, est piégé dans les bas-fonds. Obligé de partir à la poursuite du groupe de tête, il accuse une minute trente de retard, ce soir, sur ses rivaux Schleck, Schleck, et machin truc.
Rien d’irréversible…
Mais rien d’anodin non plus.
Alberto se sent-il à ce point imbattable qu’il a préféré s’épargner la haine du public en abandonnant au plus vite l’étiquette du winner ?
Exprès ?
Evidemment.
Pascal d’Huez
Au kilomètre 44, à Brem-sur-mer, paisible localité balnéaire où je mettais ce midi les pieds pour la première fois depuis le funeste été 1988, le spectacle n’attend pas le passage des coureurs.
Auprès de moi, un jeune couple est sorti de son pavillon, emportant la table basse. Il arbore une casquette avec des flammes, elle un tatouage cheap dans le bas du dos, et des talons hauts. Sur le trottoir, ils ont l’air heureux, boivent des bières light, s’embrassent, mettent en boîte les gens alentour, pointent du doigt les hélicos.
A force d’attendre les coureurs, il finit par éprouver le besoin de traverser l’îlot, pour aller partager un gobelet de whisky tiède avec une bande de cons.
Elle prend la mouche et lui lance un ultimatum. S’il boit, dit-elle, il aura droit à « la gueule ».
Il choisit de boire.
Elle est déjà au téléphone, renfrognée sur son pliant, quand il revient, dix minutes plus tard, le peloton passé et son gobelet fini. En route pour de longues heures de rame.
Au regard de ce mélodrame, la première étape de ce Tour de France 2011 propose un scénario plan-plan.
Rôdé comme le protocole d’un mariage princier, le début du Tour déroule. Une mini-chute, une sous-crevaison, trois échappés pas exigeants, un chien, une tache sur la nappe, on démarre le périple en s’étirant comme des patachons.
Quand le Tour commence par un prologue (l’usage), c’est différent. La mise sous tension est immédiate. Ce samedi, on a plutôt assisté à un aimable critérium. Pour ne rien arranger, Laurent Fignon n’est même plus là pour réchauffer l’ambiance par ses vacheries de cardinal. S’il n’y avait pas l’été, la chaleur, les ombres bleues, on grelotterait d’emmerdement, comme un soir de Téléthon.
Prévisible, à l’heure du dénouement, Cancellara arrive de derrière et surprend.
Mais le Mont des Alouettes l’écoeure rapidement de tout effort. Philippe Gilbert s’installe dans son sillage, le passe, embrasse deux fois son maillot. Et gagne. Comme prévu (le bougre a même poussé le bouchon jusqu’à se tondre les cheveux couleur paille en prévision du maillot jaune !).
Un quart d’heure plus tôt, une mouche agace une spectatrice. Elle fait un écart, et bouscule l’épaule d’un coureur Astana, qui s’effondre.
Si l’on voulait filer la métaphore (ce qui n’est vraiment pas le genre de la maison), et assimiler le peloton à une imprimante écrivant l’histoire du sport sur la route-page, on oserait écrire que le chaos qui suivit cette chute, est l’exact équivalent du fameux « bourrage-papier ».
Alberto Contador, inexplicablement mal placé, est piégé dans les bas-fonds. Obligé de partir à la poursuite du groupe de tête, il accuse une minute trente de retard, ce soir, sur ses rivaux Schleck, Schleck, et machin truc.
Rien d’irréversible…
Mais rien d’anodin non plus.
Alberto se sent-il à ce point imbattable qu’il a préféré s’épargner la haine du public en abandonnant au plus vite l’étiquette du winner ?
Exprès ?
Evidemment.
Pascal d’Huez
1 Comments:
Ton papier inaugural, prévisible de talent lui, malgré le titre, est un grand morceau.
J'te kiffe d'Huez.
Quand tu t'y mets, t'es ma came.
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