ENDORS
10.7.09

Scène inhabituelle dans l’Europe de Schengen, les coureurs ont aujourd’hui franchi la douane en activité de la frontière d’Andorre. Aucun contrôle inopiné cependant, et c’est tant mieux, car les policiers n’eurent trouvé aucun sachet d’héroïsme.
Comme beaucoup de fanas, j’avais les crocs. Je m’étais installé dans le Col de Serra-Seca avec couteau-fourchette et serviette autour du cou. Or, je n’y vis passer personne.
Pas d’attaques ? Pas de chronique ! pensais-je, dans un réflexe à la fois paresseux et nombriliste, qui nous aurait fait une belle jambe. La course a déçu, c’est vrai, mais elle vit encore.
Après tout, qui a dit que le métier de cycliste était facile ? Avec la montagne, la pression augmente. Les retransmissions commençant de plus en plus tôt, il devient difficile de se planquer dans les voitures. Les caméras ne sont jamais loin, prêtes à vous tailler une répute de tricheur si vous avez le malheur de rester appuyé à la portière trop longtemps, au prétexte de faire rectifier votre tige de selle.
Ne parlons pas du paysage. Ailleurs, dans n’importe quelle communauté d’agglomérations du Cher ou du Doubs, on pourrait se garer pépère et finir à deux à l’heure, mais ici, sur fond de glaciers, neiges éternelles et cumulus bleu argent, ça la fout mal. Dès lors, comprenons qu’une figuration, voire une belle place dans les dix premiers, soit déjà un statut fort enviable et très recherché.
Pour la victoire finale, ma foi, c’est question de gênes ou de chance, toutes catégories où il ne sert à rien de se précipiter. « Allons jusqu’à Paris, et voyons là-bas combien nous sommes », semble être la devise des principaux favoris, très peace cet après-midi dans la montée d’Arcalis, et, -si vous me permettez ce calembour offert par Ronan Pensec- quelque peu andormis.
Les leaders retardés, plutôt que de risquer leur va-tout dès la première des trois seules arrivées en côte que propose ce Tour 2009, semblent avoir choisi de passer leur tour. Leur stratégie n’est pas évidente. Où diable attaquer sur ce parcours raffiné, aux embûches bien cachées ? Sans doute avanceront-ils ainsi jusqu’à Vittel, y feront les comptes, puis tenteront désespérément de rattraper le temps perdu.
Conséquence de cet exercice de surplace : on n’en sait guère plus ce soir sur les forces en présence, sinon que Cancellara, le bolide vainqueur à Monaco, n’était pas devenu un vainqueur potentiel à la faveur de sa victoire au Tour de Suisse.
Son élimination constitue le seul fait tangible du jour. Pour le reste, c’est à la libre appréciation. Disons qu’Armstrong est bien mieux qu’au Giro, et que Contador semble le plus fort. A quel point ? Sa contre-attaque tardive dans le dernier kilomètre, plutôt correctement maintenue par Cadel et le jeune Schleck, ne permet pas d’en juger avec précision.
Tandis que rien ne se passait, il arrivait tout de même à un jeune Français de remporter l’étape. Un Feillu, qui perpétue ainsi la tradition des fratries cyclistes en succédant dans la gloire à son frérot, maillot jaune l’an passé. Le maillot jaune, justement, fatigué d’être bringuebalé par Spartacus, échoit à un discret, Nocentini, leader de l’équipe AG2R, dont le patronyme est peu ou prou l’anagramme du mot « Innocent », ce qui prouve, si besoin est, que le dopage a définitivement abandonné la course.
Demain, après une nuit passée dans la chambre des hôtesses de la combativité, j’irai garer ma GS entre les Cols de Port et d’Agnès, du côté de Tarascon, où paraît-il, demeurent encore quelques fameux mythomanes, amis jurés de Lance Armstrong.
Pascal d’Huez, envoyé spécial.
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