BILOUTES
11.4.09
Je n’aime pas Paris-Roubaix quand il fait soleil. J’aime Paris-Roubaix quand il pleut, qu’il vente, et que la boue, effaçant les publicités imprimées sur les maillots, donne l’illusion que chaque coureur roule pour lui-même.
La course de légende qui se déroule ce week-end, et qu’Hinault appelait avec son singulier snobisme paysan « une cochonnerie », est celle dont la teneur en héroïsme approche au plus près les taux certifiés dangereux pour la santé. Même l’oreillette, ce tue-l’amour, n’est pas parvenue à la rendre moins dangereuse. Et pour cause : les soubresauts subies par les machines empêchent toute réception, et quand bien même… Dès les premiers secteurs pavés, la poussière agglutinée au cérumen, suffit à former un bouchon compact dans le pavillon auditif. Vous l’ignoriez jusque-là, mais sachez que c’est sourd et muet qu’on gagne Paris-Roubaix. Comble du sadisme, le bienheureux qui se tire en premier de cette pagaille, n’a même pas le bonheur d’entendre les applaudissements.
Ce dimanche –où j’ai évidemment prévu de ne pas mettre le nez dehors- je prie pour qu’il fasse un temps de merde. Pas très jojo, penserez-vous, et pas charitable. Détrompez-vous. Beaucoup de coureurs, en regardant le bulletin météo, espèrent comme moi.
Ce ne sont pourtant pas des poules mouillées.
Les champions cyclistes qui meurent sans avoir avoué s’être dopés courent-ils Paris-Roubaix pour l’éternité ? D’après une enquête, oui. Et cette perspective en pousse plus d’un aux aveux.
Dans le boyau d’Arenberg, la mêlée est si confuse qu’il arrive de ne plus savoir très bien si les cuisses qui pédalent sous votre torse sont bien les vôtres. Certains livres d’art –hélàs épuisés- prétendent que c’est dans Paris-Roubaix que Picasso aurait puisé l’inspiration de son Guernica. Socquettes, rayons, casques, genoux écorchés et bouches ouvertes des spectateurs forment une même texture gris marron, car ici, le public –joyeux gens du Nord venus le temps d’un dimanche oublier l’âpreté de la mine- fait partie du spectacle et s’agglomère naturellement au brouet. Idéalement placé à la faveur d’un secteur pavé, un chanceux aura souvent l’occasion de toucher un coureur tombé à terre ou simple victime d’une crevaison. Mieux encore, il pourra quelquefois l’aider à remonter en selle, bien qu’emporté par sa gentillesse, l’indigène ait quelquefois tendance à en faire trop et se fustige du champion qui décline son invitation à aller se jeter une Stella dans l’estaminet voisin.
Le succès de Bienvenue chez les Ch’tis a sapé un siècle de mauvaise publicité faite au Nord par la diffusion annuelle de Paris-Roubaix. Il est temps, demain, de remettre les pendules à l’heure, et de montrer l’Enfer tel qu'il demeure : un voyage de six heures par des champs de patates pour aller chercher une poignée de frites grasses sous des nuées de « Vas-y, Biloute ! ».
Ce dimanche, il se passe quelque chose de neuf sur Paris-Roubaix. Pour la première fois depuis bien longtemps, un Français –définitivement révélé par son transfert dans une équipe Belge- semble en mesure de l’emporter. C’est du moins ce que les médias spécialisés tentent de nous suggèrer, or, on sait bien que la « Pascale » préfère les hommes expérimentés. Sylvain Chavanel, même dans sa forme actuelle, pâtit de ne l’avoir couru qu’une seule fois (en 2001), et pourrait demain essuyer un râteau faute d’avoir bien saisi la notice.
La rédaction de Sport&Erotism, judicieusement emmitouflée sous un K-way collectif au Carrefour de l’Arbre, jouera plutôt Pozzato, Maaskant, ou l’invraisemblable Haussler, tout en rêvant au succès de Flecha ou Hincapie, vieux experts gagnés par la tremblotte, proches de leur dernier baroud.
Quant à Boonen, il est aux choux. Ne pas s’en apercevoir signifie que vous avez de la boue sur vos lunettes.
Pascal d’Huez, envoyé spécial.
La course de légende qui se déroule ce week-end, et qu’Hinault appelait avec son singulier snobisme paysan « une cochonnerie », est celle dont la teneur en héroïsme approche au plus près les taux certifiés dangereux pour la santé. Même l’oreillette, ce tue-l’amour, n’est pas parvenue à la rendre moins dangereuse. Et pour cause : les soubresauts subies par les machines empêchent toute réception, et quand bien même… Dès les premiers secteurs pavés, la poussière agglutinée au cérumen, suffit à former un bouchon compact dans le pavillon auditif. Vous l’ignoriez jusque-là, mais sachez que c’est sourd et muet qu’on gagne Paris-Roubaix. Comble du sadisme, le bienheureux qui se tire en premier de cette pagaille, n’a même pas le bonheur d’entendre les applaudissements.
Ce dimanche –où j’ai évidemment prévu de ne pas mettre le nez dehors- je prie pour qu’il fasse un temps de merde. Pas très jojo, penserez-vous, et pas charitable. Détrompez-vous. Beaucoup de coureurs, en regardant le bulletin météo, espèrent comme moi.
Ce ne sont pourtant pas des poules mouillées.
Les champions cyclistes qui meurent sans avoir avoué s’être dopés courent-ils Paris-Roubaix pour l’éternité ? D’après une enquête, oui. Et cette perspective en pousse plus d’un aux aveux.
Dans le boyau d’Arenberg, la mêlée est si confuse qu’il arrive de ne plus savoir très bien si les cuisses qui pédalent sous votre torse sont bien les vôtres. Certains livres d’art –hélàs épuisés- prétendent que c’est dans Paris-Roubaix que Picasso aurait puisé l’inspiration de son Guernica. Socquettes, rayons, casques, genoux écorchés et bouches ouvertes des spectateurs forment une même texture gris marron, car ici, le public –joyeux gens du Nord venus le temps d’un dimanche oublier l’âpreté de la mine- fait partie du spectacle et s’agglomère naturellement au brouet. Idéalement placé à la faveur d’un secteur pavé, un chanceux aura souvent l’occasion de toucher un coureur tombé à terre ou simple victime d’une crevaison. Mieux encore, il pourra quelquefois l’aider à remonter en selle, bien qu’emporté par sa gentillesse, l’indigène ait quelquefois tendance à en faire trop et se fustige du champion qui décline son invitation à aller se jeter une Stella dans l’estaminet voisin.
Le succès de Bienvenue chez les Ch’tis a sapé un siècle de mauvaise publicité faite au Nord par la diffusion annuelle de Paris-Roubaix. Il est temps, demain, de remettre les pendules à l’heure, et de montrer l’Enfer tel qu'il demeure : un voyage de six heures par des champs de patates pour aller chercher une poignée de frites grasses sous des nuées de « Vas-y, Biloute ! ».
Ce dimanche, il se passe quelque chose de neuf sur Paris-Roubaix. Pour la première fois depuis bien longtemps, un Français –définitivement révélé par son transfert dans une équipe Belge- semble en mesure de l’emporter. C’est du moins ce que les médias spécialisés tentent de nous suggèrer, or, on sait bien que la « Pascale » préfère les hommes expérimentés. Sylvain Chavanel, même dans sa forme actuelle, pâtit de ne l’avoir couru qu’une seule fois (en 2001), et pourrait demain essuyer un râteau faute d’avoir bien saisi la notice.
La rédaction de Sport&Erotism, judicieusement emmitouflée sous un K-way collectif au Carrefour de l’Arbre, jouera plutôt Pozzato, Maaskant, ou l’invraisemblable Haussler, tout en rêvant au succès de Flecha ou Hincapie, vieux experts gagnés par la tremblotte, proches de leur dernier baroud.
Quant à Boonen, il est aux choux. Ne pas s’en apercevoir signifie que vous avez de la boue sur vos lunettes.
Pascal d’Huez, envoyé spécial.
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