COMME UN OURAGAN
4.7.09

Comme l’honnête garde-forestier allant installer sur la rivière les branchages compliqués qui permettront à un couple de castors souffreteux d’abriter leurs amours, le directeur du Tour de France, Christian Prud’homme, a soigneusement essaimé le parcours de cette édition 2009 de bizarreries en tous genres – contre la montre par équipes, journées sans oreillettes, final au Ventoux- afin de permettre aux champions de venir accoucher leur portée d’exploits dans le cadre naturel propice à l'éclosion de la Légende, ce fruit dont le Tour de France est l'arbre.
Première extravagance : partir de Monaco.
Voilà trois syllabes qui font briller les yeux autrement plus fort que l’évocation de nos habituels rencarts du Futuroscope et Puy-du-Fou, destinations train corail, qui chantaient l’humilité et les valeurs agricoles, mais qui –pour être honnête- ne garantissaient pas toujours le succès auprès de celle qu’on tentait d’inviter –un peu émêché- à nous prendre le bras jusqu’au départ de la plus grande épreuve cycliste de l’univers visible.
En signant, surpuissant, sa troisième victoire dans un prologue (ou assimilé) en seulement cinq participations, Fabian Spartacus Cancellara a pris place au Panthéon des maîtres du quartz, équivalant dans ce registre les Chris Boardman et Thierry Marie, pour ne citer que les spécialistes exclusifs.
Différence de taille cependant, Cancellara –miraculé selon ses propres termes, après un hiver pourri où les astres ont fait pleuvoir sur sa casquette toutes les plaies possibles des catégories Travail Amour Santé- vient de remporter le Tour de Suisse et affiche depuis quelques semaines un melon d’une pointure comparable à celle qu’il chausse (47). Mes adversaires ont intérêt à sortir leur gros manteau d’hiver quand je vais les dépasser, ce sera dur de battre Cancellara ! fanfaronnait hier soir au Jimmy'z celui qui n’hésite plus à parler de lui à la troisième personne, si bien que Pascal d’Huez en vient à se demander si le Suisse n’aurait pas reçu quelque part, à son tour, un pète au casque.
Dès lors, chers amis pendus à mon analyse, vous réclamez les enseignements à tirer de cette première virée, et vous avez raison.
Vous frissonnez et vous demandez si le maillot jaune que Spartacus se verrait bien promener jusqu’à Andorre, voire jusqu’en Suisse, ne va pas peser lourd sur la Saxo, où l’on a pu constater les légers mais significatifs progrès d’Andy Schleck dans l’exercice solitaire.
Contador, fringant dans son maillot de champion d’Espagne CLM, a-t-il levé le pied dans la descente pour ne pas hériter trop tôt du paletot merdeux ? Evidemment non. Triompher au leadership de la consistante armada Astana (4 dans les 10) lui suffit. C’était son défi du jour, et il n’était pas simple à relever au vu des chinoiseries de dernière minute d’un Armstrong fort retors, qui n’avait rien trouvé mieux pour troubler son coéquipier que de partir trois heures avant lui, pariant sur les promesses de pluie de l’approximative Team Météo France.
Or, pas de nuée sur Contador.
Ce Tour 2009 possédant la particularité de n’être taillé ni pour un grimpeur (3 arrivées au sommet seulement), ni pour un rouleur (55kms TT en tout), il serait aventureux de désigner déjà les grands battus et les vulnérables. Tout juste peut-on remarquer, eu égard à la légère nausée de Jean-Paul Sastre (1’06’’) et du vilain rendu de Menchov (1’31’’), que les voltigeurs du Vésuve jouaient moins les Valentino Rossi aujourd’hui, alors qu’ironique, la frontière italienne est pourtant toute proche.
Ce soir, chez Astana, fête de l’Indépendance et viande marinée, préparées spécialement par Lance à l’honneur d’Alberto.
Demain, preuve supplémentaire de l’effacement des repères au sein des sociétés contemporaines : on n’est pas sûr qu’un sprinter gagnera !
Seules garanties : un Français dans l’échappée, le thermostat monté à bloc, et le chagrin de l’observateur impuissant, constatant que, partis de rien, nous atteignons déjà le deuxième jour de la course.
Pascal d’Huez, envoyé spécial.
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