TOUS DERRIÈRE ET LUI DEVANT
6.7.09

Le coup de la Grande-Motte n’est-elle que le prélude d’une série d’enculades fourbie par Armstrong et Bruyneel pour l’éducation du jeune Albert ?
Possible.
Si le Septuple n’a plus ni la jeunesse ni le peps d’un… Cavendish, par exemple (anecdotique vainqueur du jour, imprenable au point qu’il faudra songer l’an prochain à concevoir une première semaine plus tourmentée si l’on veut se mettre à l’abri du prévisible), il a l’Art de la guerre du grand Sun Tzu et le Prince de Machiavel dans sa besace. Pis, il a pour lui l’arme fatale, bien connue des séducteurs qui secouent en ce moment, sur la plage de l’Espiguette, leurs cheveux poivre et sel : l’Ambiguité.
C’est enveloppé dans le maillot à reflets changeants du coureur le plus ambigu que Lance, accompagné d’une vingtaine d’illuminés, a réussi à fausser compagnie à l’ensemble des favoris, piégés par la traditionnelle bordure de Camargue aux alentours du kilomètre 150.
Rappel des faits.
Il est 17h. Maman Peloton rappelle l’échappée sortie jouer en début d’après-midi, car il est bientôt l’heure du bain. Dans la maison, chacun sa tâche. Les Lampre bâillent, les Columbia s’agitent. Le vacarme des motos tient lieu de silence, et, pas trop vigilant, on écoute tranquillement finir l’étape en attendant son résumé.
Toutes les conditions sont réunies pour l’accident domestique.
Hélàs, seuls les plus sensibles ont remarqué le changement d’inclinaison des roseaux. Flippés, les flamants roses décollent. Leur inquiétude gagne le hêtre, le peuplier, le Cofidis puis le Cervélo. Trop tard. L’air maritime s’est engouffré dans le peloton comme dans un drapeau, et a créé un éventail à l’avant. Derrière, c’est la queue-leu-leu, et bientôt l’asphyxie. La coupure est nette.
On se regarde, idiots. Reprendre ses esprits nécessite dix kilomètres.
Pendant ce temps, le front a déjà pris vingt secondes. Puis trente, car derrière, on ne sait trop quoi faire. Le contre-la-montre par équipes de demain rend économes, l’étape était de toutes façons déjà perdue, et puis, hormis ce mytho de Cancellara, il n’y a aucun candidat sérieux au podium parmi les fugitifs.
Aucun ?
La question turlupine. Evans demande conseil à Menchov qui va voir Sastre qui choisit d’appeler un ami. Malheureusement, Valverde est en double-appel. Les visages se rident autant que la surface des étangs d’eau saumâtre qui encadrent la course. L’hésitation quant à savoir si Lance Armstrong peut ou non gagner le Tour de France, coûte encore dix secondes supplémentaires, avant qu’on se décide à mettre en route.
Devant, on a été plus prompts à dénouer l’énigme, et c’est comme un seul homme que Zubeldia et Popo (plus en jambes que l’an passé, quand il passait son Erasmus chez Silence) se sont mis à relayer la garde du Cav.
Au bout du compte, rien qu’une péripétie, sous réserve de connaître la suite de l’histoire.
Contador, qui avait mis tant de soin à devancer ses coéquipiers à Monaco, se retrouve désormais quinze secondes derrière Armstrong, dont absolument personne ne peut deviner l’exact niveau, et qui, si d’aventure, ce mardi, les Astana brutalisaient l’épreuve, s’emparerait –quel coup !- du maillot jaune, dix ans après son premier essayage.
Demain, grand jour pour les Garmin-Jacquard, qui préparent leur boum depuis des mois, et ne comptent certainement pas se laisser chiper la vedette. Quel combo méritera le nom de dream team ? Quelle escouade saura le mieux mettre au service de ses muscles accumulés l’esprit d’entraide et de camaraderie ? Famille Saxo ? Columbia en pleine bourre pour finir de remplir les caisses et permettre à chacun de rentrer avant Andorre ?
C’est ce que nous saurons tout à l’heure, tandis que de ma chambre d’hôtel avec vue sur la Mosson, j’observe une pensée pour la valeureuse équipe Euskaltel, dont les membres, portés sur la grimpe et assis sur un banc, grillent clope sur clope à défaut de trouver le sommeil.
Pascal d’Huez, envoyé spécial.
2 Comments:
Ils grillent clope sur clope ! Sympa comme préparation pour la montagne :)
Brillante analyse. Je ne vois pas non plus comment Manuel Valls va faire son trou au PS, depuis que j'ai appris le retour de Jospin sur Twitter.
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