BOUM !
17.7.08
Avec un timing excellent, les affaires de dopage surgissent à des moments creux de la course, aussi prévisibles et consternantes de banalité qu’un épisode de Sous le Soleil.
Les blagues fusaient depuis Brest à propos de la bien-nommée équipe Saunier-Duval -un fabricant de chaudières, fût-il utile de le rappeler à ceux qui se chaufferaient exclusivement au baume. En coulisses, sur les forums du cyber-cyclisme, certains rabat-joie se gaussaient en soulignant les exploits de l’usine à gaz espagnole, pétaradante mais si efficace qu’elle nous faisait office de machine à remonter le temps, celui, préhistorique, où Gewiss et Mapei vivaient dans l’insouciance.
Hélàs, dans un souffle à peine moins puissant que celui de l’usine AZF, Cobra et Cie ont explosé en vol. A dégoûter ELM Leblanc de prendre la relève du Crédit Agricole. Logiquement, les coureurs renvoyés connaîtront dès leur retour dans leur foyer la double-peine de s’être aussi fait couper l’eau chaude.
Serait-il abusé, comme on dit aujourd’hui dans les écoles de cyclisme, de constater l’influence évidente, voire excessive, du sponsor sur les athlètes qu’il habille ? Qui n’a pas remarqué la prudence des coureurs AG2R, cette impression que donne chacun des leurs, inclus dans une échappée, qu’il pourrait l’accompagner tout au long de la vie ? La générosité intéressée des Cofidis « je t’offre un relais de 500m remboursable en dix relais de 60 » ? Les paris hasardeux de la Française des Jeux ? Les dents à rayer le parquet des jeunes loups de la Quick Step ? Les exemples s’accumulent et font presque froid dans le dos de pertinence. Au vu de cette démonstration, soutenons la direction du Tour pour qu’elle réponde par avance non aux futures teams Haricots Bonduelle, Tefal-Mondial Moquette et Roc’eclerc-Juvamine, aux funestes présages. Nous nous épargnerons pas mal d'emmerdes inutiles.
Sitôt le serpent débusqué, le carnaval habituel s’est remis en marche avec ses numéros bien rôdés et ennuyeux. Bouquets de micros qui engloutissent des coureurs inadaptés aux spotlights, concours de formules toutes faites parmi les journalistes avec une prédilection pour un « Le Tour est en train de gagner la partie » d’une joie un peu fabriquée, commentaires enfin, critiques et empruntés, des coureurs arrivés à bon port, doublés de mines de chats serviles.
A l’instar du Président de la République, autre institution, le Tour de France a une vie privée dont il est dorénavant convenu de tout savoir. Cette existence intérieure a pourtant toujours connu des soubresauts. Dès sa deuxième édition, la course disqualifiait son vainqueur au profit du second, parce qu’il était accusé d’avoir pris le train. Cette aventure burlesque et sans cesse renouvelée fait le sel de ce rendez-vous de l’été qui, sans cela, paraîtrait quelquefois bien morne. Dès lors, à quoi bon promettre à chaque départ un nouveau départ, une odyssée propre au podium impeccable ? On croirait entendre un organisateur de voyages garantir une croisière sans vagues. C’est peut-être après tout, le destin qui attend Christian Prud’homme, la vocation tardive de Tour-operator. La traversée de juillet reste vivante comme la vie même, avec ses braves gars et ses mauvais garçons. On ne peut pas d’un côté plébisciter les petits villages et de l’autre rejeter Prévert.
Il n’aura échappé à personne que le Boum entendu aux alentours de midi, quand a éclaté la citerne Saunier-Duval appartient à Charles Trénet, natif de Narbonne, où les coureurs, Mark Cavendish en tête, arrivaient ce soir. C’est cependant à un autre gars du coin que je laisserai le micro en conclusion, le poète Pierre Reverdy, dont je dédie bien cordialement l'extrait qui suit au jeune Riccardo Ricco :
« Dans sa chute il comprit qu’il était plus lourd que son rêve et il aima, depuis, le poids qui l’avait fait tomber ».
Cobrage, Coura.
Pascal d’Huez
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