LA BRETAGNE LIBRE
6.7.08
L’étape du jour, qui conduisait les coureurs à travers la vallée de l’Oust pour rallier Saint-Brieuc aux alentours de 17h, a donné lieu à une situation rare, bien dans l’esprit de ce Tour du renouveau aux accents vintage. Quatre français échappés, comme en ce temps du fond des âges où le Sonolor filait avec le Frimatic à fond les manettes, puisque le pétrole, ce jus de socquette, se mendiait alors à deux sous la barrique.
Parmi eux, les trois principales vedettes du peloton national + le régional du jour. Une vieille gloire, un espoir éternel cherchant à confirmer son palier récemment franchi, un ancien héros s’étant rabattu sur le maillot à pois roses du roi des faux-cols, et une jeune pousse locale. Chris, Sly, Tom et Dave. Quatre garçons dans le vent iodé des plaines briochines, quatre têtus contre le reste du monde.
Pendant ce temps, la retransmission hachée de l’interview du stratège Marc Madiot à bord de sa bagnole peinturlurée de trèfles, nous en apprend beaucoup. « Les jeux sont à faire », avance-t-il, imprudent, avant de tempérer aussitôt : « Mais rien n’est joué ». N’empêche que ce sont ses gars qui mènent la chasse, de façon absurde, puisque rien ne les pousse à prendre en charge la poursuite, sauf, peut-être, une rivalité franco-française déplacée étant donné la conjoncture et les turbulences économiques traversées par notre laborieux pays.
Ceux de la Française, épaulés par quelques expats, se chargent de ramener les fugitifs dans le bon sens, de les reconduire à la norme. Coyot, Portal, quelques belles individualités pourtant, sacrifient leur personne au culte de cette entité suprême qu’est le peloton, organisme à part entière qu’il faut quotidiennement nourrir de coureurs évadés, et qui défèque entre deux ilôts directionnels sa matière superflue, sous forme de grimpeurs éclopés.
La craie de l’ardoisier est-elle maintenue dans un esprit rétro à l’heure où les statistiques nous offrent en bas de l’écran l’heure exacte à laquelle les fuyards seront repris ? Sachez qu’en France, en 2008, l’espérance de vie moyenne d’une échappée avoisine les deux heures, ce qui la place sur la carte du monde vivant entre l’araignée d’eau et le cassiope (une espèce de papillon). Te voilà, lecteur, en mesure de briller en société, ce dimanche soir.
Au gré du vent, selon qu’il souffle de face ou dans le dos, les coureurs perdent, puis reprennent de l’avance, avant d’être finalement engloutis, au terme d’une résistance héroïque.
Après la côte de Cadoudal hier, une nouvelle arrivée-surprise témoigne de l’originalité bienvenue du style Prud’homme, un auteur moins convenu que le paraphraseur Leblanc.
Sont déjà prévus pour l’année prochaine, une arrivée sur la plage de Saint-Jean-de-Monts, où, soyons-en certains, le sable saura départager les meilleurs, et le franchissement de la Garonne au terme de l’étape Dax-Toulouse.
Demain, dernier volet du préambule breton. Du nord au sud, cette fois, pour achever un Z qui ne voudra certainement pas dire Zubeldia, puisqu’on voit mal ce coureur, plutôt porté sur la montagne, déboucher en tête sur le billard de Saint-Herblain.
Pascal d’Huez, envoyé spécial.
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