PANTANI VAINQUEUR, GAUL EN JAUNE
10.7.08
« Ma parole, c’est tous les jours 14 juillet ! », pétaradait cet après-midi le commentateur de France 2, vu que Chavanel et Bichot sacrifiaient à leur tour à la tradition du baroud, laissant croire au téléspectateur distrait qu’on repasse chaque jour le même épisode des Chevaliers du ciel. Anticipant sur les coupes sombres promises dans son budget, la deuxième chaîne tape déjà dans les stocks de rediff, et c’est avec une désagréable impression de déjà-vu qu’on suit les coureurs français se faire brouter l’écart jusqu’à dissolution totale. Du coup, on ne sait pas trop si l’on doit les remercier pour leur dynamisme bénévole ou les blâmer pour leur sens tactique approximatif et leur manque d’ambition. Sur ce dernier point, le duel Chavanel-Voeckler pour la conquête du maillot à tout petits pois atteint des gouffres et évoque la lutte sans merci de deux sucres concourant à toucher en premier le fond de la tasse. Kiffent-ils de se faire ramasser à la petite cuillère ? Frustrant, car avec le temps, il semble que Chavanel soit devenu un meilleur coureur et qu’il pourrait prétendre à challenge plus emballant. Qui sait même, misère de misère, si ce second couteau ne cache pas un crack ?
Cette étape aux formes généreuses, bien que marquée par la chute mal venue du maillot jaune Schumacher dans le dernier kilomètre, s’avère finalement décevante, aucun favori n’ayant tenté d’attaquer dans une montée de Superbesse bien plate. Une désillusion à relativiser, car qui parmi nous, lecteur, envisageait sérieusement qu’une empoignade allait se produire si tôt dans l’aventure, sur une pente moyenne, alors que le plus gros reste à venir et que les principaux concurrents, de force égale, n’ont aucune urgence à se livrer ?
Le Tour, ce petit vieux qui s’habille en fluo, roule en parlant du passé. Curieux comme ce soir, deux des plus prestigieux grimpeurs de l’épreuve se rappellent à notre souvenir, en empruntant le véhicule flambant neuf de coureurs en pleine bourre, maillot jaune, vert, et vainqueur d’étape. C’est ni plus ni moins de deux apparitions qu’ont été témoins les suiveurs perspicaces, soudain à genoux au pied du podium : Charly Gaul, vainqueur en 58, de retour dans la peau de Kim Kirchen, se voyait enfin relevé de son statut de dernier maillot jaune d’un duché qui compte proportionnellement à sa superficie plus de champions que la France n’a de fromages ; puis, de nouveau lauréat après quelques tristes années de placard, le Pirate en personne, Marco Pantani venait saluer la foule, grimé en un jeune champion au surnom porteur, Riccardo Ricco.
Ricco, dont la carrière sur le Tour naît véritablement ce soir, dans la région des Puy, par une belle victoire au sprint sur un demi-peloton de cadors, entre par la même occasion au musée du cyclisme, lequel, pour d’obscures raisons administratives, est un sous-département du muséum d’histoire naturelle. Après différents pandas, éléphants, grillons et blaireaux, et en attendant la validation du dromadaire Moreau et du koala Evans, voici qu’on intronise le cobra Ricco.
Mais ne se trompe-t-on pas quand on croit voir une analogie avec le serpent chez ce jeune homme fort en gueule et véritable asshole, qui déclare que Pozzato est un « champion au petit cul » et Contador « un imposteur» ? Ne devrait-on pas plutôt le rapprocher du personnage de dessin-animé des années 80, inspiré de Jean-Paul Belmondo, dont l’avant-bras renfermait un rayon delta toujours prêt à dégainer ?
« Homme ou machine ?
nul n’imagine
quel est son secret
Nul ne le sait.
Mais d'ou vient la puissance de Cobra ?
Oui d'ou vient le courage de Cobra ? »
Pascal d’Huez
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