PÉGASE
12.1.07
Ami lecteur, impatient de connaître l'issue de mon odyssée, tu seras bientôt délivré du suspens, car si je t'écris ce soir d'un lieu tenu secret quelque part dans la montagne, c'est que je viens de réaliser un gros coup, à l'image de Cyril Dessel à Pau, confisquant en une après-midi maillot jaune et maillot à pois.
Hier soir, trois individus sont venus me chercher à l’hôtel, au motif d’ «avoir à me parler». Conservé sous de sobres masques d’anciens champions cyclistes, leur anonymat m’inspira confiance, et j’acceptai de les suivre, assis dans l’obscurité, à l’arrière d’un véhicule utilitaire.
Au bout d’une demi-heure de virages, de côtes, et de ce qui –depuis mon siège de fortune au-dessus de la roue arrière – me faisait l’effet d’un chemin de terre, on me débarqua dans une bâtisse en pierres. Une section d’Iparretarrak y avait établi son QG, et la décoration abondait de drapeaux basques et de posters de Roberto Laiseka.
S’il s’excusait de la façon peu civile dont on avait mené jusqu’ici, il était avant tout grand amateur de mes chroniques (notamment les passages concernant Patouche), et tenait à m’aider dans mon enquête, persuadé d’avoir à m’apporter des révélations concernant Kevin Lebon, qu’il avait bien connu à Sport-études.
Déterminés à devenir des champions, -l’un afin de subvenir aux besoins de sa mère, l’autre pour soutenir la libération d’Euskadi- ils avaient reçu la visite d’un professeur à la faculté de médecine de Charleroi, qui, sur une proposition de Jean Robert, leur avait proposé d’intégrer le Projet Pégase.
- « Pégase ? » fis-je, malgré le scotch que mes nouveaux compagnons avaient placé sur ma bouche pour me permettre d’entendre mieux.
Il s’agissait de tester auprès d’un panel de jeunes champions, une molécule de synthèse inédite, dérivée du sang de cheval, appelée l’hippodine.
En aucun cas, il n’était question de dopage ! Le mot faisait bondir de dégoût le professeur, qui aimait mieux parler d’expérience thérapeutique à l’usage des accidentés de la route. Non seulement, l’hippodine ne figurait pas sur la liste des produits interdits, mais surtout, ne représentant aucun danger pour la santé, elle constituait un réel espoir pour l’humanité.
Quelques mois d’administration quotidienne avaient suffi aux deux lycéens à améliorer de façon notable le niveau de leurs performances. Ils gagnaient course sur course, se faisant des politesses au passage de la ligne, et, déjà, les équipes pros envoyaient des tailleurs prendre leurs mensurations.
Quant à Kevin, il avait préféré tout arrêter à temps et rentrer en Alsace.
Dans les dernières semaines de lycée, il se plaignait de faire ce rêve récurrent: Echappé solitaire, il prenait toujours plus de temps sur le peloton, au point de sortir de la course, se retrouvant dans une contrée sans public et sans vie.
Il me fallait au plus vite mettre la main sur ce mystérieux professeur.
orroitzapenez betea,
zorionaren atea !
zorionaren atea !
zorionaren atea ! »
Pascal D’Huez, envoyé spécial depuis les Pyrénées-Atlantiques.
0 Comments:
Enregistrer un commentaire
<< Home