LE TOUR NE PASSERA PAS
1.11.05
La révélation du tracé du Tour 2006 a provoqué un gros embouteillage, jeudi midi, sur la route de la mairie, à Gargan, dans l’Yonne.
Puisque la ville –bâtie sur un puissant socle de granit- se portait candidate à l’organisation d’une arrivée, le conseil municipal avait installé un écran géant, et c’est en famille entière qu’on est venu assister à l’annonce officielle, dans une ambiance d’arbre de Noël.
Vers treize heures, l’animation 3D s’achevant sur les Champs-Elysées, il a pourtant fallu se rendre à l’évidence.
Les esprits les plus vifs auront remarqué qu’aucun passage par Gargan n’est programmé en juillet.
Les Gargannais aussi.
Réagissant dignement par un long silence, certains d’entre eux ont ensuite tenté de caillasser l’adjoint au sport, Yves Philibert, un ancien jockey, qui avait porté le projet à bout de bras. Un peu plus tard, sa voiture, une Polo grise, était basculée dans le fossé.
Réfugié dans l’école maternelle avec une partie des élus, le jeune maire Patrick Richard n’explique pas la défaite de sa municipalité. La veille encore, au téléphone, Christian Prud’homme l’avait assuré de sa sympathie, et les habitants avaient fourni tant d’efforts depuis près d’un an, qu’il semblait impensable que le Tour échappe à Gargan.
Alors quoi ? Que s’est-il passé ? Que manque-t-il ici qu’on trouve à Valkenburg, la ville jumelée ?
Pour devenir ville-étape, rien n’avait été négligé. Élu sur cette seule proposition, le maire avait d’emblée pris des mesures fortes, comme la courageuse destruction du temple gallo-romain dont les éboulis fréquents auraient pu nuire au passage d’un peloton groupé.
Il s’agissait de toute urgence d’attirer la lumière sur cette ville encaissée et mal desservie, récemment sinistrée par la fermeture des usines Pim's et Bounty.
On envisageait une grande fête.
Un prologue de huit kilomètres devait emprunter le circuit du complexe industriel Vertubex. Le lendemain, la première étape, Gargan-Gargan, aurait conduit les coureurs du musée interactif du minerai au labyrinthe de maïs, via le chantier des fouilles.
Les simulations réalisées par ordinateur promettaient, et en haut lieu, on parlait même d’un partenariat sur plusieurs années. Gargan allait devenir une difficulté incontournable, au même titre que l’Alpe-d’Huez.
Dès vendredi, l’opposition s’est abattue sur Patrick Richard, lui reprochant notamment la construction précipitée de 18 kilomètres de piste cyclable, dans une ville où, c’est vrai, on pratique plutôt la voiture, du fait de l’abondance de côtes.
Sujette à controverse également, la visite de Bernard Hinault, en août, au cours d’un voyage officieux. Logé à l’Hôtel du Héron, le Blaireau, végétarien notoire, s’était vu offert un gueuleton, en vue duquel on avait plumé pas moins de 24 perdreaux. Et tout ça pour quel résultat ?
L’affaire du Blaireau a contraint le maire à la contre-attaque.
Il s’en est violemment pris à la ville jumelée de Valkenburg. La visite prévue en juin a été annulée, ainsi que toute forme d’échange scolaire. Souhaitant immédiatement remotiver les Gargannais, il a évoqué la possibilité d’organiser une contre-épreuve, le premier Tour gay.
Cette annonce a suscité un enthousiasme immédiat, et deux kilomètres de chemin cyclable bi et lesbien ont été budgétés, ainsi qu’une nuit du feu d’artifice homosexuel.
Ces initiatives aidant, la vie reprend, même si beaucoup prétendent qu’ils ne regarderont pas le Tour l’été prochain, puisque c’est magouille et compagnie.
Au bowling, rendez-vous des jeunes, la vue d’un ancien champion de la montagne à la télévision provoque des sifflets.
Des bicyclettes sont saccagées, et les cyclotouristes égarés, contraints de descendre pour traverser la ville à pied.■
Pascal D’Huez, envoyé spécial.
Puisque la ville –bâtie sur un puissant socle de granit- se portait candidate à l’organisation d’une arrivée, le conseil municipal avait installé un écran géant, et c’est en famille entière qu’on est venu assister à l’annonce officielle, dans une ambiance d’arbre de Noël.
Vers treize heures, l’animation 3D s’achevant sur les Champs-Elysées, il a pourtant fallu se rendre à l’évidence.
Les esprits les plus vifs auront remarqué qu’aucun passage par Gargan n’est programmé en juillet.
Les Gargannais aussi.
Réagissant dignement par un long silence, certains d’entre eux ont ensuite tenté de caillasser l’adjoint au sport, Yves Philibert, un ancien jockey, qui avait porté le projet à bout de bras. Un peu plus tard, sa voiture, une Polo grise, était basculée dans le fossé.
Réfugié dans l’école maternelle avec une partie des élus, le jeune maire Patrick Richard n’explique pas la défaite de sa municipalité. La veille encore, au téléphone, Christian Prud’homme l’avait assuré de sa sympathie, et les habitants avaient fourni tant d’efforts depuis près d’un an, qu’il semblait impensable que le Tour échappe à Gargan.
Alors quoi ? Que s’est-il passé ? Que manque-t-il ici qu’on trouve à Valkenburg, la ville jumelée ?
Pour devenir ville-étape, rien n’avait été négligé. Élu sur cette seule proposition, le maire avait d’emblée pris des mesures fortes, comme la courageuse destruction du temple gallo-romain dont les éboulis fréquents auraient pu nuire au passage d’un peloton groupé.
Il s’agissait de toute urgence d’attirer la lumière sur cette ville encaissée et mal desservie, récemment sinistrée par la fermeture des usines Pim's et Bounty.
On envisageait une grande fête.
Un prologue de huit kilomètres devait emprunter le circuit du complexe industriel Vertubex. Le lendemain, la première étape, Gargan-Gargan, aurait conduit les coureurs du musée interactif du minerai au labyrinthe de maïs, via le chantier des fouilles.
Les simulations réalisées par ordinateur promettaient, et en haut lieu, on parlait même d’un partenariat sur plusieurs années. Gargan allait devenir une difficulté incontournable, au même titre que l’Alpe-d’Huez.
Dès vendredi, l’opposition s’est abattue sur Patrick Richard, lui reprochant notamment la construction précipitée de 18 kilomètres de piste cyclable, dans une ville où, c’est vrai, on pratique plutôt la voiture, du fait de l’abondance de côtes.
Sujette à controverse également, la visite de Bernard Hinault, en août, au cours d’un voyage officieux. Logé à l’Hôtel du Héron, le Blaireau, végétarien notoire, s’était vu offert un gueuleton, en vue duquel on avait plumé pas moins de 24 perdreaux. Et tout ça pour quel résultat ?
L’affaire du Blaireau a contraint le maire à la contre-attaque.
Il s’en est violemment pris à la ville jumelée de Valkenburg. La visite prévue en juin a été annulée, ainsi que toute forme d’échange scolaire. Souhaitant immédiatement remotiver les Gargannais, il a évoqué la possibilité d’organiser une contre-épreuve, le premier Tour gay.
Cette annonce a suscité un enthousiasme immédiat, et deux kilomètres de chemin cyclable bi et lesbien ont été budgétés, ainsi qu’une nuit du feu d’artifice homosexuel.
Ces initiatives aidant, la vie reprend, même si beaucoup prétendent qu’ils ne regarderont pas le Tour l’été prochain, puisque c’est magouille et compagnie.
Au bowling, rendez-vous des jeunes, la vue d’un ancien champion de la montagne à la télévision provoque des sifflets.
Des bicyclettes sont saccagées, et les cyclotouristes égarés, contraints de descendre pour traverser la ville à pied.■
Pascal D’Huez, envoyé spécial.
1 Comments:
Il n'y a pas de voitures qui brulent la-bas?
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