BRAD SE CRASHE
9.7.11
Aujourd'hui, j'ai emprunté le téléphérique qui mène du centre de Grenoble à la Bastille, bastion fortifié qui domine la ville. Dans la boule transparente, tandis que je redoutais la chute de notre aéronef dans l'Isère, les coureurs du Tour de France ne faisaient pas semblant, eux, et s'offraient une sorte de suicide collectif, un gadin de première.
Une dizaine de coureurs gisent au sol.
Vinokourov, Leipheimer, Farrar, repartent en vrac, mais profiteront de l'aspiration des voitures pour se rebecter. Plus long à se relever, Bradley Wiggins tient son coude gauche dans la main droite, comme un petit chat, dans cette posture d'orphelin qui annonce la clavicule cassée. De l'autre côté de la chaussée, Chris Horner s'est brisé le nez. Les docteurs prodiguent les premiers soins dans la contusion générale.
La première semaine du Tour de France, qui charrie son peloton électrique par des coupe-gorges mal éclairés, élimine fréquemment l'un de ses favoris sur chute. Le champion de Grande-Bretagne fait cette année les frais de ce principe. Dommage, on allait rallier la montagne.
Les raisons de l'accident demeurent non élucidées. Le commissaire à qui l'on a confié l'enquête, évoque, dans son rapport, une route plutôt large et dégagée, sans îlot directionnel, ni passage piéton. Sans doute, dans cette longue ligne droite, un coureur s'est-il endormi.
Le dénouement de l'étape est un classique, maintes fois raconté.
L'échappée rattrapée à une distance raisonnable du finish -c'est à dire, pas trop près, afin de ne pas susciter de faux espoirs- les équipiers des sprinteurs déboulent comme des putains de malades dans la paisible Châteauroux. Sans souci du danger, ils se ramènent à moitié ivres, rappellent à la vieille cité médiévale de lointains souvenirs de mise à sac par des pillards casqués.
La métaphore sexuelle est permise. La banderole d'arrivée se tortille, réclame qu'on la bouleverse. A cinq-cents mètres de la ligne, les équipiers bout-en-train s'écartent, l'assaut est donné.
Les tombeurs s'affrontent dans une frénésie véritablement animale. Gilbert, maillot vert sur les épaules, Rojas, Feillu, Petacchi, Greipel, envahissent toute la largeur de la route avec, en tête, la même idée. Hélas pour eux, leur spasme est amer et c'est encore une fois en tapant du poing sur le guidon qu'ils achèvent l'étape, dépassés par ce diable de Cavendish.
Le man of Man a vraiment le ticket. Il signe sa dix-septième victoire d'étape en quatre participations, le tout sans jamais se départir de son air de diablotin dilettante. Quand les contrôles anti-dopage permettront enfin de débusquer le talent, ses adversaires auront peut-être l'espoir de le voir mis hors-course. En attendant, il faut se résoudre à tenir la chandelle. Ce qui n'est déjà pas si mal.
Aujourd'hui, une semaine déjà après le départ de Vendée, la course convoque ses favoris au rendez-vous de Super-Besse, Massif Central, pour une petite grimpette apéritive qui, si elle ne devrait pas provoquer de gros écarts, fournira l'occasion de frissonner. Contador et Schleck en profiteront sans doute pour sortir de leur emballage plastique leurs nouvelles tenues de danseuses, afin, le cas échéant, de procéder à d'ultimes retouches.
La montagne, la vraie, attend encore son heure, tapie dans son mystère.
Elle mûrit patiemment sa défense.
C'est du moins ce que je m'imaginais ce vendredi après-midi, en observant le massif de la Chartreuse, Chamechaude, son Col de Porte et le Mont-Saint-Eynard, depuis les hauteurs de Grenoble, où je suis finalement parvenu sans encombres.
Pascal d'Huez
Une dizaine de coureurs gisent au sol.
Vinokourov, Leipheimer, Farrar, repartent en vrac, mais profiteront de l'aspiration des voitures pour se rebecter. Plus long à se relever, Bradley Wiggins tient son coude gauche dans la main droite, comme un petit chat, dans cette posture d'orphelin qui annonce la clavicule cassée. De l'autre côté de la chaussée, Chris Horner s'est brisé le nez. Les docteurs prodiguent les premiers soins dans la contusion générale.
La première semaine du Tour de France, qui charrie son peloton électrique par des coupe-gorges mal éclairés, élimine fréquemment l'un de ses favoris sur chute. Le champion de Grande-Bretagne fait cette année les frais de ce principe. Dommage, on allait rallier la montagne.
Les raisons de l'accident demeurent non élucidées. Le commissaire à qui l'on a confié l'enquête, évoque, dans son rapport, une route plutôt large et dégagée, sans îlot directionnel, ni passage piéton. Sans doute, dans cette longue ligne droite, un coureur s'est-il endormi.
Le dénouement de l'étape est un classique, maintes fois raconté.
L'échappée rattrapée à une distance raisonnable du finish -c'est à dire, pas trop près, afin de ne pas susciter de faux espoirs- les équipiers des sprinteurs déboulent comme des putains de malades dans la paisible Châteauroux. Sans souci du danger, ils se ramènent à moitié ivres, rappellent à la vieille cité médiévale de lointains souvenirs de mise à sac par des pillards casqués.
La métaphore sexuelle est permise. La banderole d'arrivée se tortille, réclame qu'on la bouleverse. A cinq-cents mètres de la ligne, les équipiers bout-en-train s'écartent, l'assaut est donné.
Les tombeurs s'affrontent dans une frénésie véritablement animale. Gilbert, maillot vert sur les épaules, Rojas, Feillu, Petacchi, Greipel, envahissent toute la largeur de la route avec, en tête, la même idée. Hélas pour eux, leur spasme est amer et c'est encore une fois en tapant du poing sur le guidon qu'ils achèvent l'étape, dépassés par ce diable de Cavendish.
Le man of Man a vraiment le ticket. Il signe sa dix-septième victoire d'étape en quatre participations, le tout sans jamais se départir de son air de diablotin dilettante. Quand les contrôles anti-dopage permettront enfin de débusquer le talent, ses adversaires auront peut-être l'espoir de le voir mis hors-course. En attendant, il faut se résoudre à tenir la chandelle. Ce qui n'est déjà pas si mal.
Aujourd'hui, une semaine déjà après le départ de Vendée, la course convoque ses favoris au rendez-vous de Super-Besse, Massif Central, pour une petite grimpette apéritive qui, si elle ne devrait pas provoquer de gros écarts, fournira l'occasion de frissonner. Contador et Schleck en profiteront sans doute pour sortir de leur emballage plastique leurs nouvelles tenues de danseuses, afin, le cas échéant, de procéder à d'ultimes retouches.
La montagne, la vraie, attend encore son heure, tapie dans son mystère.
Elle mûrit patiemment sa défense.
C'est du moins ce que je m'imaginais ce vendredi après-midi, en observant le massif de la Chartreuse, Chamechaude, son Col de Porte et le Mont-Saint-Eynard, depuis les hauteurs de Grenoble, où je suis finalement parvenu sans encombres.
Pascal d'Huez
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