NORWAY : TWO POINTS
21.7.11
Pluie de sauterelles sur le nord de l’Italie.
Les coureurs déferlent, le ventre chaque jour un peu plus mince, les cuisses chaque jour plus grosses.
On s’attendait ce mercredi à la resucée de l’étape d’hier. Le profil, similaire, s’annonçait propice à une nouvelle déconvenue des Schlecks, lesquels avaient pris soin de préparer le terrain dans la presse. Andy (à propos de la descente finale vers Pinarolo) : « Une course qui se joue dans la descente ? Je ne sais pas. Pour moi, ce type de parcours est un très mauvais choix. On a tous une famille à la maison et ce type d'arrivée ne devrait pas être autorisé. »
Comme prévu, aux alentours de 14h30, une escouade de bravaches part en première ligne tenter de décrocher la timbale, ou du moins, une pincée de temps d’antenne.
Malin, dans l’idée d’en garder sous la pédale pour les jours à venir, j’envisage de me livrer à un petit copié-collé des familles, ni vu ni connu. Il me suffira de rééditer mon texte d’hier, et d’en changer les noms et les lieux via la commande rechercher/remplacer. Quant aux adjectifs, je n’aurais qu’à mettre la taille au-dessus. Grandiose au lieu de Grand, puis Sensas au lieu de Bien, etc… tout ce petit trafic en faisant bien attention de garder encore de la marge pour le Galibier, puis l’Alpe d’Huez, vendredi.
Seulement, le Tour de France se la joue femme fatale, cette année. Il fait mumuse avec nos attentes, se complait à nous faire languir, concède un rendez-vous auquel il ne vient pas, décommande, vient quand même, fait la gueule, repart.
Après deux semaines et demie de ce régime, mes joues sont creusées, et mon cuissard, quand je trouve la force de me lever, me tombe aussitôt sur les chevilles.
On ne peut plus compter sur rien ni sur personne.
Sestrières effacée sans trop de respect, Perez Moreno entre en tête dans la campagne italienne et entame la montée du fameux Pra Martino, avec moins d’une bouchée de pain d’avance sur ses contre-attaquants. Le début de la grimpette surprend. Chavanel joue à l’élastique. Le champion de France prend momentanément la tête, puis se laisse surprendre par le Boasson, again.
Le comprendrez-vous ? A cinq minutes de là, il est pourtant la même heure.
Le peloton des costauds (sous-entendu débarrassé de la tripotée de lopettes classées au-delà de la quarantième place au général) commence à son tour l’ascension de la dernière bosse.
Voeckler est bien. Evans est bien. Les Schleck sont bien, mais soucieux.
A 16h45, le chant du rossignol, sifflé depuis la frondaison d'un mélèze empereur, crispe le visage d'Andy Schleck. Il annonce l’attaque imminente du Ber de Pinto.
Brusquement, un courant électrique parcourt la mêlée des cadors. Ca n'est pas vraiment douloureux, mais ça pique, ça brûle, et ça lance.
Sur une pente moyenne, Contador, et son dossard 220 volts, placent une accélération cassante, qui, si elle ne lui permet pas de décrocher ses rivaux, occupe l'écran de la plus belle des façons.
A force de le voir s’échiner, je finis par devenir fan du coco. Tout dans son attitude confirme ce que l’on devinait déjà. Alberto Contador est le seul authentique champion présent sur cette course. Les autres sont de bons, voire de grands coureurs, mais, jusqu’à présent, et dans l’attente d’être détrompé, Contador est le seul à tenter de redresser son destin parti de traviole au premier jour de course, le seul à nous proposer plus que de la bicyclette, et à nous offrir du cyclisme, ce courant philosophique et sportif qui combine mécanique sommaire et romantisme.
I like.
N’ayant largué personne au sommet, le Pisto flingue sans limitation de vitesse dans la descente. Le tracé est terriblement dangereux et notre sifflet, coupé pendant dix bonnes minutes de tuerie à tombereaux ouverts. Malchance, Tommy Boy, à force d’oser, se tape plusieurs tout-droits, et finit même dans la cour de la propriété de l’acteur Aldo Maccione, occupé à travailler sa démarche.
Pendant ce temps, en compagnie de son nouveau pote Sanchez, Alberto part en cavale pour une longue ligne droite jusqu’à l’arrivée. Le tandem serre les dents, le nez dans le vent. Une fine équipe, que ces deux-là. Gageons qu’on les retrouvera au Lido dimanche soir.
Appelée à la rescousse, l’horloge parlante m’informe qu’ils possèdent dix secondes d’avance sur leurs poursuivants, mais elle avance, puisque, aux cinq-cents mètres, les deux frangins Léopard rappliquent, accompagnés de Cadel et des Italiens Basso et Cunego, qui avaient sans doute espéré une end plus happy.
Malgré tous ses efforts, le vainqueur sortant ne récolte rien ce soir, et après deux jours de quolibets, il convient de féliciter les Schlex pour avoir descendu le Pra Martino comme des chefs.
Sinon, concernant la victoire d’étape, sachez désormais que le cyclisme sur route est un sport qui se pratique en plein air, et où un Norvégien gagne à la fin.
Demain, audition des sept trompettes au Col Agnel, combat avec le dragon dans l’Izoard, et Jugement dernier en haut du Galibier.
Un menu qui pourra paraître copieux au novice, mais auquel les coureurs du Tour de France sont parfaitement préparés.
Pascal d’Huez
Les coureurs déferlent, le ventre chaque jour un peu plus mince, les cuisses chaque jour plus grosses.
On s’attendait ce mercredi à la resucée de l’étape d’hier. Le profil, similaire, s’annonçait propice à une nouvelle déconvenue des Schlecks, lesquels avaient pris soin de préparer le terrain dans la presse. Andy (à propos de la descente finale vers Pinarolo) : « Une course qui se joue dans la descente ? Je ne sais pas. Pour moi, ce type de parcours est un très mauvais choix. On a tous une famille à la maison et ce type d'arrivée ne devrait pas être autorisé. »
Comme prévu, aux alentours de 14h30, une escouade de bravaches part en première ligne tenter de décrocher la timbale, ou du moins, une pincée de temps d’antenne.
Malin, dans l’idée d’en garder sous la pédale pour les jours à venir, j’envisage de me livrer à un petit copié-collé des familles, ni vu ni connu. Il me suffira de rééditer mon texte d’hier, et d’en changer les noms et les lieux via la commande rechercher/remplacer. Quant aux adjectifs, je n’aurais qu’à mettre la taille au-dessus. Grandiose au lieu de Grand, puis Sensas au lieu de Bien, etc… tout ce petit trafic en faisant bien attention de garder encore de la marge pour le Galibier, puis l’Alpe d’Huez, vendredi.
Seulement, le Tour de France se la joue femme fatale, cette année. Il fait mumuse avec nos attentes, se complait à nous faire languir, concède un rendez-vous auquel il ne vient pas, décommande, vient quand même, fait la gueule, repart.
Après deux semaines et demie de ce régime, mes joues sont creusées, et mon cuissard, quand je trouve la force de me lever, me tombe aussitôt sur les chevilles.
On ne peut plus compter sur rien ni sur personne.
Sestrières effacée sans trop de respect, Perez Moreno entre en tête dans la campagne italienne et entame la montée du fameux Pra Martino, avec moins d’une bouchée de pain d’avance sur ses contre-attaquants. Le début de la grimpette surprend. Chavanel joue à l’élastique. Le champion de France prend momentanément la tête, puis se laisse surprendre par le Boasson, again.
Le comprendrez-vous ? A cinq minutes de là, il est pourtant la même heure.
Le peloton des costauds (sous-entendu débarrassé de la tripotée de lopettes classées au-delà de la quarantième place au général) commence à son tour l’ascension de la dernière bosse.
Voeckler est bien. Evans est bien. Les Schleck sont bien, mais soucieux.
A 16h45, le chant du rossignol, sifflé depuis la frondaison d'un mélèze empereur, crispe le visage d'Andy Schleck. Il annonce l’attaque imminente du Ber de Pinto.
Brusquement, un courant électrique parcourt la mêlée des cadors. Ca n'est pas vraiment douloureux, mais ça pique, ça brûle, et ça lance.
Sur une pente moyenne, Contador, et son dossard 220 volts, placent une accélération cassante, qui, si elle ne lui permet pas de décrocher ses rivaux, occupe l'écran de la plus belle des façons.
A force de le voir s’échiner, je finis par devenir fan du coco. Tout dans son attitude confirme ce que l’on devinait déjà. Alberto Contador est le seul authentique champion présent sur cette course. Les autres sont de bons, voire de grands coureurs, mais, jusqu’à présent, et dans l’attente d’être détrompé, Contador est le seul à tenter de redresser son destin parti de traviole au premier jour de course, le seul à nous proposer plus que de la bicyclette, et à nous offrir du cyclisme, ce courant philosophique et sportif qui combine mécanique sommaire et romantisme.
I like.
N’ayant largué personne au sommet, le Pisto flingue sans limitation de vitesse dans la descente. Le tracé est terriblement dangereux et notre sifflet, coupé pendant dix bonnes minutes de tuerie à tombereaux ouverts. Malchance, Tommy Boy, à force d’oser, se tape plusieurs tout-droits, et finit même dans la cour de la propriété de l’acteur Aldo Maccione, occupé à travailler sa démarche.
Pendant ce temps, en compagnie de son nouveau pote Sanchez, Alberto part en cavale pour une longue ligne droite jusqu’à l’arrivée. Le tandem serre les dents, le nez dans le vent. Une fine équipe, que ces deux-là. Gageons qu’on les retrouvera au Lido dimanche soir.
Appelée à la rescousse, l’horloge parlante m’informe qu’ils possèdent dix secondes d’avance sur leurs poursuivants, mais elle avance, puisque, aux cinq-cents mètres, les deux frangins Léopard rappliquent, accompagnés de Cadel et des Italiens Basso et Cunego, qui avaient sans doute espéré une end plus happy.
Malgré tous ses efforts, le vainqueur sortant ne récolte rien ce soir, et après deux jours de quolibets, il convient de féliciter les Schlex pour avoir descendu le Pra Martino comme des chefs.
Sinon, concernant la victoire d’étape, sachez désormais que le cyclisme sur route est un sport qui se pratique en plein air, et où un Norvégien gagne à la fin.
Demain, audition des sept trompettes au Col Agnel, combat avec le dragon dans l’Izoard, et Jugement dernier en haut du Galibier.
Un menu qui pourra paraître copieux au novice, mais auquel les coureurs du Tour de France sont parfaitement préparés.
Pascal d’Huez
0 Comments:
Enregistrer un commentaire
<< Home