FORCES EN PRÉSENCE
2.7.10
Un tour parfait. Un cercle nickel, divisé en vingt portions rigoureusement similaires. Un rêve d’équilibre, hommage à la roue, dans lequel aucune étape n’est à souligner en rouge, aucune ville ne l’emporte sur une autre.
Cet itinéraire, malheureusement écarté par Christian Prudhomme, sous prétexte que les coureurs roulant à l’intérieur du virage jouiraient d’un avantage certain, ne compte qu’une seule arrivée en montagne, à Vals en Suisse. Pour le reste, on retiendra que les sprinteurs s’y seraient régalés, avec notamment d’alléchants Montaigu-Laval, Laval-Caen, ou encore Agen-Libourne…
Mais passons…
Le Tour, le vrai, l’officiel, part demain.
Je vais tenter à présent de vous en exposer les enjeux.
Cette édition 2010 avance un ultra-favori. Après son probant succès de l’an passé, Alberto Contador revient avec une équipe Astana entièrement dévouée à sa cause. On se souvient qu’il avait passé son mois de juillet à batailler contre son coéquipier Armstrong et ses sbires, faux-derches portant tous casaque américaine sous le maillot bleu et or. Depuis, le jeune Albert a continué à gagner pratiquement toutes les courses à étapes où il s’est aligné, semblant progresser encore. Il a même réalisé une belle semaine ardennaise, au terme de laquelle il en a profité pour aller reconnaître les pavés du nord avec Peter Van Petegem. Tout ça serait presque trop beau. Tempérons donc en soulignant que –pour la première fois- Alberto s’élancera vers Paris sans son coach et mentor Johann Bruyneel, suiveur de Lance chez Radioshack. On l’appellera le Ber, le Beber, le Pistolero de Pinto, ou la Contada, si jamais il donne un récital.
L’été dernier, il fallait se pincer pour y croire. On vivait des interférences dans la frise des âges. Armstrong, disparu depuis cinq ans, revenait disputer le jersey à une génération de coureurs qu’il avait laissé enfants. Ce n’était qu’un début. Ivan Basso et Alex Vinokourov, les bannis de l’édition 2006 – édition maudite, qui figurait le premier tour de l’après-Lance et qui engendra un vainqueur de plomb - vont enfin pouvoir en découdre. Anecdotique ? Capital, au contraire. Les deux anciens ténors ont retrouvé des jambes. Le premier vient de gagner un Giro superbe et achalandé, quand l’autre a fait main basse sur Liège-Bastogne-Liège au nez des Schleck et de son coéquipier Contador.
Quel rôle joueront les vieux briscards, survivants des années dope ? Vino va-t-il à son tour jouer les tontons casse-pieds ? Ou bien reprendra-t-il du service dans la brigade des artificiers, comme au milieu des années 2000, lorsqu’il sauvait par sa seule présence des après-midi de juillet promis à l’ennui ?
Ici, on appellera Basso, la basse, Babasse, le basson ou le hautbois de Gallarate, s’il nous régale. A Vino, on donnera de l’Astaman, de L’Homme au couteau entre les dents, du Wino, s’il gagne, de la vinasse s’il se ramasse.
Les challengers naturels, maintenant.
Les dauphins Schleck. Tellement inséparables qu’on se demande s’il faut les traiter indépendamment l’un de l’autre ou les considérer comme un lot.
Andy ne s’est guère montré. Où en est-il ? Difficile à évaluer. S’il n’a sans doute rien perdu de son talent, il ne l’a pas non plus fait fructifier au contact de la compétition. A son actif, indiquons que le Tour 2010 est étonnamment pauvre en chrono. Hormis le prologue, une seule étape contre-la-montre. Bonne nouvelle pour les Schleck, moyens dans l’exercice. A tempérer toutefois, puisque l’enivrant Bordeaux-Pauillac de la veille des Champs-Elysées, constituera un pur parcours de spécialistes, sur 51kms sans abri.
Notons aussi que cette année, c’est au tour de Franckie de porter le maillot de champion du Luxembourg.
Sur cette page, on appellera Andy, le Lux Supérior, l’Andiste, l’Alcool de Riis si ça marche, du Schleck sans provisions s’il coince. A son frère, on donnera de l’Asperge, du Saxo ténor, de la Grande Saucisse Alpine.
Au-delà des Schleck, on trouvera notre bon vieux Cadel. Evans. Transfiguré depuis qu’il a obtenu son titre de champion du monde, l’automne dernier, à Mendrisio. Cadel – c’est à la fois sa gloire et son handicap- a été de toutes les luttes depuis janvier. On l’a vu en Australie, en haut du mur de Huy, on l’a retrouvé en Italie, porteur du maillot rose, infatigable. L’an passé, il avait raté son tour dans les grandes largeurs, écoeuré par les vapeurs de frites empoisonnant la cantine de la Silence-Omega. On le retrouve chez BMC, une équipe à sa mesure, bien équilibrée. Pas le plus fort en montagne, mais difficile à lâcher, costaud, il pourrait briguer un accessit, si toutefois il évite le piège des pavés de Wallers, dans lequel on le voit bien perdre cinq minutes.
On appellera Cadel, l’Homme de Katherine, Cadel Advance, le Peaceful ou Cadelito.
L’outsider habituel, Denis Menchov ? Bof. Il lui faudra déjà imposer son leadership chez la Rabobank, où le jeune Gesink aspire à une promotion. Plutôt du Manchot donc, de la Chochoffe.
Idem pour le sympa Brad Wiggins, qu’on voit mal refaire le coup de la quatrième place, quand bien même il fait partie de la nouvelle et puissante équipe Sky, aux côtés du jeune surdoué Boasson Hagen, dont ce sera le premier tour.
Saluons la présence –ultime sans doute- d’un Carlos Sastre, rangé des affaires générales, qui visera une victoire d’étape, et celle, plus sympa encore de notre Cricri d’amour, Christophe Moreau, pour un dernier Dj-set sous les couleurs de la Caisse d’Epargne, équipe plus ou moins livrée à elle-même depuis l’annonce de la suspension de son leader, Valverde.
Reste Lance, dont on devine mal ce qu’il a derrière la tête.
Sa décision de prolonger sa carrière d’une année supplémentaire avait été prise au cours du Tour 2009, dans le tumulte d’une épreuve qui l’avait laissé amer et revanchard. Déraisonnable pour une fois, il avait agréablement surpris.
Le revoici donc, pour la toute dernière fois en tournée dans l’hexagone, à la tête d’une escouade de fidèles au nom cisaillant, la Radioshack. Sa saison a été laborieuse, compliquée. A travers quelques déclarations, il a semblé se rendre compte de ses carences et de l’impossibilité qu’il a désormais à les combler.
Gagner le Tour semble hors de portée.
Toutefois, on n’ignore pas ce dont ce diable d’homme est capable. A savoir à peu près tout, tant son habileté en et hors course ne souffre aucun rival.
C’est pourquoi, une dernière fois, on l’appellera Monoballe, la Balle, le Survivant d’Austin, la Lance à incendie, et si le vent tourne en sa faveur, le Septuple, le Sept fois vainqueur, le Champion des Champions, voire même l’Octocannibalos.
Pascal d’Huez, depuis Rotterdam.
Cet itinéraire, malheureusement écarté par Christian Prudhomme, sous prétexte que les coureurs roulant à l’intérieur du virage jouiraient d’un avantage certain, ne compte qu’une seule arrivée en montagne, à Vals en Suisse. Pour le reste, on retiendra que les sprinteurs s’y seraient régalés, avec notamment d’alléchants Montaigu-Laval, Laval-Caen, ou encore Agen-Libourne…
Mais passons…
Le Tour, le vrai, l’officiel, part demain.
Je vais tenter à présent de vous en exposer les enjeux.
Cette édition 2010 avance un ultra-favori. Après son probant succès de l’an passé, Alberto Contador revient avec une équipe Astana entièrement dévouée à sa cause. On se souvient qu’il avait passé son mois de juillet à batailler contre son coéquipier Armstrong et ses sbires, faux-derches portant tous casaque américaine sous le maillot bleu et or. Depuis, le jeune Albert a continué à gagner pratiquement toutes les courses à étapes où il s’est aligné, semblant progresser encore. Il a même réalisé une belle semaine ardennaise, au terme de laquelle il en a profité pour aller reconnaître les pavés du nord avec Peter Van Petegem. Tout ça serait presque trop beau. Tempérons donc en soulignant que –pour la première fois- Alberto s’élancera vers Paris sans son coach et mentor Johann Bruyneel, suiveur de Lance chez Radioshack. On l’appellera le Ber, le Beber, le Pistolero de Pinto, ou la Contada, si jamais il donne un récital.
L’été dernier, il fallait se pincer pour y croire. On vivait des interférences dans la frise des âges. Armstrong, disparu depuis cinq ans, revenait disputer le jersey à une génération de coureurs qu’il avait laissé enfants. Ce n’était qu’un début. Ivan Basso et Alex Vinokourov, les bannis de l’édition 2006 – édition maudite, qui figurait le premier tour de l’après-Lance et qui engendra un vainqueur de plomb - vont enfin pouvoir en découdre. Anecdotique ? Capital, au contraire. Les deux anciens ténors ont retrouvé des jambes. Le premier vient de gagner un Giro superbe et achalandé, quand l’autre a fait main basse sur Liège-Bastogne-Liège au nez des Schleck et de son coéquipier Contador.
Quel rôle joueront les vieux briscards, survivants des années dope ? Vino va-t-il à son tour jouer les tontons casse-pieds ? Ou bien reprendra-t-il du service dans la brigade des artificiers, comme au milieu des années 2000, lorsqu’il sauvait par sa seule présence des après-midi de juillet promis à l’ennui ?
Ici, on appellera Basso, la basse, Babasse, le basson ou le hautbois de Gallarate, s’il nous régale. A Vino, on donnera de l’Astaman, de L’Homme au couteau entre les dents, du Wino, s’il gagne, de la vinasse s’il se ramasse.
Les challengers naturels, maintenant.
Les dauphins Schleck. Tellement inséparables qu’on se demande s’il faut les traiter indépendamment l’un de l’autre ou les considérer comme un lot.
Andy ne s’est guère montré. Où en est-il ? Difficile à évaluer. S’il n’a sans doute rien perdu de son talent, il ne l’a pas non plus fait fructifier au contact de la compétition. A son actif, indiquons que le Tour 2010 est étonnamment pauvre en chrono. Hormis le prologue, une seule étape contre-la-montre. Bonne nouvelle pour les Schleck, moyens dans l’exercice. A tempérer toutefois, puisque l’enivrant Bordeaux-Pauillac de la veille des Champs-Elysées, constituera un pur parcours de spécialistes, sur 51kms sans abri.
Notons aussi que cette année, c’est au tour de Franckie de porter le maillot de champion du Luxembourg.
Sur cette page, on appellera Andy, le Lux Supérior, l’Andiste, l’Alcool de Riis si ça marche, du Schleck sans provisions s’il coince. A son frère, on donnera de l’Asperge, du Saxo ténor, de la Grande Saucisse Alpine.
Au-delà des Schleck, on trouvera notre bon vieux Cadel. Evans. Transfiguré depuis qu’il a obtenu son titre de champion du monde, l’automne dernier, à Mendrisio. Cadel – c’est à la fois sa gloire et son handicap- a été de toutes les luttes depuis janvier. On l’a vu en Australie, en haut du mur de Huy, on l’a retrouvé en Italie, porteur du maillot rose, infatigable. L’an passé, il avait raté son tour dans les grandes largeurs, écoeuré par les vapeurs de frites empoisonnant la cantine de la Silence-Omega. On le retrouve chez BMC, une équipe à sa mesure, bien équilibrée. Pas le plus fort en montagne, mais difficile à lâcher, costaud, il pourrait briguer un accessit, si toutefois il évite le piège des pavés de Wallers, dans lequel on le voit bien perdre cinq minutes.
On appellera Cadel, l’Homme de Katherine, Cadel Advance, le Peaceful ou Cadelito.
L’outsider habituel, Denis Menchov ? Bof. Il lui faudra déjà imposer son leadership chez la Rabobank, où le jeune Gesink aspire à une promotion. Plutôt du Manchot donc, de la Chochoffe.
Idem pour le sympa Brad Wiggins, qu’on voit mal refaire le coup de la quatrième place, quand bien même il fait partie de la nouvelle et puissante équipe Sky, aux côtés du jeune surdoué Boasson Hagen, dont ce sera le premier tour.
Saluons la présence –ultime sans doute- d’un Carlos Sastre, rangé des affaires générales, qui visera une victoire d’étape, et celle, plus sympa encore de notre Cricri d’amour, Christophe Moreau, pour un dernier Dj-set sous les couleurs de la Caisse d’Epargne, équipe plus ou moins livrée à elle-même depuis l’annonce de la suspension de son leader, Valverde.
Reste Lance, dont on devine mal ce qu’il a derrière la tête.
Sa décision de prolonger sa carrière d’une année supplémentaire avait été prise au cours du Tour 2009, dans le tumulte d’une épreuve qui l’avait laissé amer et revanchard. Déraisonnable pour une fois, il avait agréablement surpris.
Le revoici donc, pour la toute dernière fois en tournée dans l’hexagone, à la tête d’une escouade de fidèles au nom cisaillant, la Radioshack. Sa saison a été laborieuse, compliquée. A travers quelques déclarations, il a semblé se rendre compte de ses carences et de l’impossibilité qu’il a désormais à les combler.
Gagner le Tour semble hors de portée.
Toutefois, on n’ignore pas ce dont ce diable d’homme est capable. A savoir à peu près tout, tant son habileté en et hors course ne souffre aucun rival.
C’est pourquoi, une dernière fois, on l’appellera Monoballe, la Balle, le Survivant d’Austin, la Lance à incendie, et si le vent tourne en sa faveur, le Septuple, le Sept fois vainqueur, le Champion des Champions, voire même l’Octocannibalos.
Pascal d’Huez, depuis Rotterdam.
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