CASSÉ
11.7.11
A la veille de la journée de repos, le peloton ballonne, gavé par une première semaine d'anxiété vendéenne, d'angoisse bretonne, et de stress normand au beurre du Mont-Saint-Michel. La fatigue commence à tirer sur le bide. Et pas que le bide, d'ailleurs.
Ainsi, la chute intervenue à mi-course n'est que la conséquence d'une erreur de jugement, un instant d'inattention, un virage pris trop serré par la faute d'une pensée vagabonde.
Au fin fond d'un sous-bois, en contrebas du parcours, des coureurs au maillot turquoise se redressent, en se frottant la fesse, grimaçant. On se force à espérer qu'il s'agit de la traditionnelle sortie champignons de l'amicale cyclo-gay locale. Le contexte, hélas, n'autorise aucun doute.
Le pire est à craindre. Il se produit lorsqu'on découvre Alexandre Vinokourov soutenu par deux équipiers, le visage escagassé par la douleur. Quand on se rappelle à quel point l'animal est dur au mal, on peut raisonnablement redouter qu'il ne s'agisse pas de chiqué.
Contrairement à ce que je me risquais à parier après l'arrivée à Super-Besse, -où Vino nous offrit son dernier coup de rein, son testament aux générations futures- le champion kazakh ne portera probablement jamais le maillot jaune. Fémur cassé, il quitte ce Tour de France, et le cyclisme sans doute, dans un sentiment de tristesse infinie.
Espérons que son exemple aura fait des émules devant les postes de télévision.
La bagnole, -les cyclistes le savent mieux que les piétons,- est un grossier personnage. Un vélo passe, et c'est à peine si l'air se trouble. Tout au plus la bicyclette siffle-t-elle comme un pinson, là où la voiture avance ses gros sabots-vapeur, cabosse les pare-chocs, et dégueulasse les vêtements.
L'une d'entre elles, Citroën noire au capot peint France 2/ France 3, s'est rendue coupable d'un attentat en bonne et due forme sur J.-A. Flecha et Johnny Hoogerland, échappés en compagnie de Veau clair, Sandy Vachard, et Louis-Léon Chanchez.
Depuis l'accident -d'une violence incroyable pour un dimanche après-midi de télévision- l'on cherche partout un responsable, quelque chose, n'importe quoi, à montrer du doigt, à pendre, ou à interdire. On voudrait y trouver le prétexte pour mettre au pilori Gérard Holtz qui, pourtant, n'y est pour pas grand chose.
Avec la mesure qui nous caractérise, contentons-nous de constater que l'imbécillité magistrale trouve souvent en vitesse et précipitation des alliés remarquables, et que le profit -caché ici sous la carrosserie de la société Euro Média, pourvoyeuse de sons et d'images- lui fournit les moyens de se sublimer.
Jeté dans les barbelés, Hoogerland est reparti, les cuisses tailladées, nécessitant trente-trois points de suture. Quant à Flecha, non moins héroïque, il a rallié Saint-Flour avec un coude en forme de pomme de terre. Son cubitus apparent a été abondamment documenté par France Télévisions, qui, sur ce coup-là, a démontré toute l'étendue de son savoir-faire. A la fois à la mise en scène et à la réalisation. Au départ, comme à l'arrivée de l'action.
Ce lundi, la journée de repos permettra aux survivants de l'enduro national d'allonger leurs guiboles écorchées dans la pelouse. Ayons une pensée pour les masseurs, pour qui c'est le coup de feu.
Une petite sortie de 80 bornes égayera l'après-midi juste ce qu'il faut, avant l'apéritif.
Les Leopard y croiseront les Saxo. Tous ces messieurs soulèveront leur casque pour se saluer, avant de reprendre, en direction des Pyrénées, les hostilités.
Pascal d'Huez, Montreuil-sous-Bois.
3 Comments:
le Tour de France ça me fait chier.
Une fin saumâtre pour le dernier des grands fauves sauvages sévissant dans le sport occidental.
Merci Pascal pour ce papier !
le Tour de France ça me fait chier.
Enregistrer un commentaire
<< Home