NOUS N'AVONS ENCORE RIEN VU À BRIANÇON
17.7.07
Impossible de saisir la profondeur de ce Tour 2007 sans remarquer que s’y affrontent deux générations. D’un côté, les trentenaires, nés avant la vague punk, encore nourris des illusions du flower power, qu’on repère à leur nature relax, cheveux souvent longs et marguerite aux lèvres ; de l’autre, ceux qui, nés après la victoire de Hinault à Sallanches, ne jurent que par Cure, Depeche mode, et Coluche. Fluo, vêtements cintrés, gadgets tape-à-l’œil constituent leur panoplie. Nés au moment du boum informatique, ils ont dans ce domaine plusieurs longueurs d’avance sur leurs aînés, et possèdent un goût inné pour la technologie qui –selon l’avis de certains spécialistes- leur permettra de régner bientôt sur la totalité du peloton vivant.
Après Linus Gerdemann samedi, la domination des kids a connu un nouvelle heure de gloire à travers l’hommage rendu aujourd’hui par le jeune Mauricio Soler à ceux qui, en 1983, l’année de sa naissance, avaient osé pour la première fois quitté le circuit colombien pour venir disputer le Tour de France.
Ces pionniers de l’équipe Varta, dont les aventures se confondaient dans notre imagination avec celles des personnages des Mystérieuses Cités d’Or, mériteraient plutôt d’être qualifiés de précolombiens, puisque leurs noms ne brillaient pas encore du lustre d'Herrera ou de Fabio Parra, mais de la flamme, avant-coureur, de Jimenez et Corredor.
Amateurs, leur petite taille encourageait la condescendance des coureurs pros qui, du moins jusqu’aux Alpes, jouaient à tapoter en passant leur cuir chevelu noir et fourni. On aimait aussi se moquer de leur sponsor, une marque de piles électriques, qui les assimilaient, en ces années pubs, aux petits lapins endurants d’une société rivale.
Souvent oublié des rétrospectives, ce premier contingent amérindien contribua à émanciper le Tour à papa. Quant aux rires des coureurs de la Ti-Raleigh sur le passage des Nescafé, ils tournèrent vite aux râles dans les lacets de l’Alpe-d’Huez, où les Hollandais avaient eu la naïveté de se croire chez eux.
Porté par la brise, mon équipage et moi-même nous imaginerions presque au-dessus des Andes, lorsque, aux alentours de 15 heures, nous pointons, superbes, la tête entre Télégraphe et Galibier. Puisque nous avons choisi ce moyen de locomotion à des fins écologiques, c’est bien malgré nous que nous perturbons le calme d’un troupeau de brebis, qu’un jeune pâtre surveille d’un œil, l’autre vissé sur l’écran de son mobile, où l’on annonce l’arrivée prochaine des coureurs en bas du col.
C’est le moment subtil qui précède l’arrivée de la foudre.
Inexplicablement, certains favoris se laissent glisser à l’arrière du peloton, déchaînant les appels paniqués des commentateurs qui pensent y déchiffrer des signes. Dans les coffres, les couvercles des glacières se referment sur des canettes déconcertées.
A bord, l’Ours Paxton –c’est peu de le dire- ne tient pas en place ; et il faut toute la sagesse d’un Roger Pingeon pour l’empêcher de déchirer notre toile.
En fait d’Alpes, c’est la Sierra Nevada qui se présente. L’Espagnol Alberto Contador met à profit ses connaissances en géologie pour piéger ses collègues. Habile, il joue des propriétés piézoélectriques du quartz pour créer une étincelle. Puis l’explosion.
Sans doute handicapé par la pancarte que des nigauds ont trouvé malin de lui mettre dans le dos, Christophe Moreau connaît alors quelques difficultés à suivre les meilleurs, mais s’accroche cependant, encouragé par le Président de la République venu spécialement à sa hauteur pour lui proposer un strapontin, avant de se faire vivement houspiller par les commissaires de course.
Sur la place principale de Briançon, où Mauricio Soler, accompagné de ses coéquipiers, entonne le tube de son enfance « We are the Barloworld, we are the Barlochildren… », Alex Vinokourov, connoté seventies mais héroïque, vomit sa fête gâchée.
Pourtant, si la première partie du périple se termine, et que les genoux sont parfois esquintés, le suspense demeure intact.
Nul encore ne devine ce qui est inscrit sur la pancarte.
Une partie de cochon pendu s’engage, qui ne révèlera son issue qu’en dernière semaine.
Pascal d’Huez, envoyé spécial.
Après Linus Gerdemann samedi, la domination des kids a connu un nouvelle heure de gloire à travers l’hommage rendu aujourd’hui par le jeune Mauricio Soler à ceux qui, en 1983, l’année de sa naissance, avaient osé pour la première fois quitté le circuit colombien pour venir disputer le Tour de France.
Ces pionniers de l’équipe Varta, dont les aventures se confondaient dans notre imagination avec celles des personnages des Mystérieuses Cités d’Or, mériteraient plutôt d’être qualifiés de précolombiens, puisque leurs noms ne brillaient pas encore du lustre d'Herrera ou de Fabio Parra, mais de la flamme, avant-coureur, de Jimenez et Corredor.
Amateurs, leur petite taille encourageait la condescendance des coureurs pros qui, du moins jusqu’aux Alpes, jouaient à tapoter en passant leur cuir chevelu noir et fourni. On aimait aussi se moquer de leur sponsor, une marque de piles électriques, qui les assimilaient, en ces années pubs, aux petits lapins endurants d’une société rivale.
Souvent oublié des rétrospectives, ce premier contingent amérindien contribua à émanciper le Tour à papa. Quant aux rires des coureurs de la Ti-Raleigh sur le passage des Nescafé, ils tournèrent vite aux râles dans les lacets de l’Alpe-d’Huez, où les Hollandais avaient eu la naïveté de se croire chez eux.
Porté par la brise, mon équipage et moi-même nous imaginerions presque au-dessus des Andes, lorsque, aux alentours de 15 heures, nous pointons, superbes, la tête entre Télégraphe et Galibier. Puisque nous avons choisi ce moyen de locomotion à des fins écologiques, c’est bien malgré nous que nous perturbons le calme d’un troupeau de brebis, qu’un jeune pâtre surveille d’un œil, l’autre vissé sur l’écran de son mobile, où l’on annonce l’arrivée prochaine des coureurs en bas du col.
C’est le moment subtil qui précède l’arrivée de la foudre.
Inexplicablement, certains favoris se laissent glisser à l’arrière du peloton, déchaînant les appels paniqués des commentateurs qui pensent y déchiffrer des signes. Dans les coffres, les couvercles des glacières se referment sur des canettes déconcertées.
A bord, l’Ours Paxton –c’est peu de le dire- ne tient pas en place ; et il faut toute la sagesse d’un Roger Pingeon pour l’empêcher de déchirer notre toile.
En fait d’Alpes, c’est la Sierra Nevada qui se présente. L’Espagnol Alberto Contador met à profit ses connaissances en géologie pour piéger ses collègues. Habile, il joue des propriétés piézoélectriques du quartz pour créer une étincelle. Puis l’explosion.
Sans doute handicapé par la pancarte que des nigauds ont trouvé malin de lui mettre dans le dos, Christophe Moreau connaît alors quelques difficultés à suivre les meilleurs, mais s’accroche cependant, encouragé par le Président de la République venu spécialement à sa hauteur pour lui proposer un strapontin, avant de se faire vivement houspiller par les commissaires de course.
Sur la place principale de Briançon, où Mauricio Soler, accompagné de ses coéquipiers, entonne le tube de son enfance « We are the Barloworld, we are the Barlochildren… », Alex Vinokourov, connoté seventies mais héroïque, vomit sa fête gâchée.
Pourtant, si la première partie du périple se termine, et que les genoux sont parfois esquintés, le suspense demeure intact.
Nul encore ne devine ce qui est inscrit sur la pancarte.
Une partie de cochon pendu s’engage, qui ne révèlera son issue qu’en dernière semaine.
Pascal d’Huez, envoyé spécial.
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